Les Allemands (Oberg) demandent à Laval 40 000 juifs et juives en âge de travailler.
– *Préparation
Depuis 1940, « Vichy » a fait des juifs français des sous-citoyens. Ils sont fragilisés par l’aryanisation et la perte de leur emploi. Des arrestations ont eu lieu, en particulier celles des « mal étoilés ». Des juifs étrangers sont internés, en 1938, puis 1940, « raflés » en 1941.
Laval, chef du gouvernement renvoyé fin 1940, car trop ouvertement pro-allemand, revenu en 1942, à fond pour la collaboration avec l’Allemagne, veut se débarrasser des « indésirables ».
Bousquet, secrétaire général de la police de Vichy, est prêt à livrer les juifs indésirables étrangers qui seront arrêtés par la police française, pour des questions de souveraineté nationale.
Les Allemands (Dannecker délégué d’ Eichmann) ont fait établir par la Préfecture de Police (PP) de Paris un fichier juif. Ils l’ont déjà utilisé pour la rafle du XIe du 20 août 1941. Doivent être arrêtés les juifs d’origine polonaise, russe, allemande, autrichienne, tchèque. Les services de Tulard, responsable du fichier juif, ont sorti du fichier les fiches de tous les apatrides, relève Laurent Joly, pas forcement concernés par l’accord.
27 400 fiches d’arrestation, dont des enfants.
Une monumentale chasse à l’homme doit avoir lieu. Il faut faire du chiffre.
Arrestation de juifs de 2 à 60 ans. Quelques exemptions comme les femmes de prisonniers de guerre, mais il faut le savoir.
4 500 policiers sont mobilisés. Les commissaires d’arrondissement et de banlieue organisent avec les fiches les arrestations, par deux, un en tenue, un en civil, un ancien et un jeune.
- La rumeur
Le 15 juillet. On ne croit pas la rumeur qui se répand. On cache les hommes (À la « rafle » du billet vert de 1941, seuls les hommes ont été arrêtés), pas les femmes et les enfants. On n’y croit pas, on ne comprend pas. Les maris décident. On cache les hommes. On cherche un abri. On n’ouvre pas.
- Le 16 juillet, une rafle monstre
L’attitude des policiers varie, un certain malaise s’installe.À 4 heures du matin, les policiers trouvent les gens endormis, les enfants en pyjama. Que faire des enfants ? Et des gens protégés ? Des consignes différentes, sans les enfants ou avec ? Quelques policiers ont été humains. « Je reviens dans deux heures. » Des commissaires n’ont pas dit de défoncer les portes.
Le 16 juillet, on regroupe les personnes dans des « centres de triage ».
11 363 juifs sont retenus et transférés à Drancy pour les adultes ou au Vél’ d’Hiv’, à Paris XVe, pour les femmes et les enfants, au milieu des cris, des scènes de panique.
C’est le chaos. Incurie administrative. Les enfants sont en majorité français.
De nombreuses évasions ont lieu, comme celle de Sarah Montard [1] et sa mère. Parmi les évadés, Lazare Pytkowicz, tout jeune résistant :
https://www.ordredelaliberation.fr/fr/compagnons/lazare-pytkowicz.
Jean-Christophe Notin, Petit Louis, Le plus jeune compagnon de la Libération, Grasset, 2024
https://www.grasset.fr/livre/petit-louis-9782246837268/
15 000 juifs ont échappé à la rafle du 16.
- Le 17 juillet, la Rafle après la Grande rafle
La rafle continue avec les fiches pour retrouver ceux qui ont échappé à l’arrestation. Des portes s’ouvrent, des concierges parlent. Les policiers trouvent moins de monde que le 16 à leur domicile.
Certaines fiches concernent des hommes arrêtés en 1941.
12 884 personnes arrêtées les 16 et 17 juillet.
Plus de 4000 enfants ont été arrêtés. La préfecture envisage le transfert des enfants à Pithiviers et à Beaune-la-Rolande, loin de Paris, en attendant l’autorisation de déportation de Berlin. On ment aux parents, au cardinal Suhard, au pasteur Boegner, Laval parle de « déportation familiale ».
Les hommes de la « Rafle du billet vert » ont été déportés à Auschwitz par les convois 4, 5 et 6 (partis les 25 juin, 28 juin et 17 juillet de Pithiviers et Beaune-la-Rolande).
On continue de chercher les manquants du 16 juillet avec les fichiers de contrôle.
bilan Au 20 juillet on a un total de 13 157 personnes arrêtées.
Cf. le cahier de documents et photos n°24, 25, 30.
Avec le tampon « Recherché » sur les fiches du fichier de contrôle :
Dora Bruder
Esther Dzig
« La population parisienne est indignée. »
- Les connaissances de la Rafle
Georges WELLERS se demande pourquoi les enfants, Adam RAYSKI pense que c’est grâce aux communistes que les gens ont été avertis. Claude LÉVY et Paul TILLARD utilisent les témoignages des victimes. Cabu avait fait des illustrations pour le lancement de leur livre.
Ils avaient étudié la « Rafle », mais leurs recherches étaient partielles et comportaient des erreurs. Joly s’interroge en particulier sur l’attitude de la police parisienne, des concierges, les quartiers concernés. Il utilise les fichiers de Serge Klarsfeld, par arrondissement, les adresses, des dossiers d’épuration,
Joly corrige certaines erreurs comme l’utilisation de l’expression Vent Printanier :
Eugen Kogon utilise l’expression« Vent printanier » à propos du transfert d’internés politiques de prisons françaises vers le Reich en 1944 (du fort de Romainville à Ravensbrück). Le nombre de suicide est exagéré.
Laurent Joly a fait un travail complet sur ce drame, en croisant documents et témoignages, il permet de comprendre les engrenages dans ce crime, la lâcheté, les mensonges (Déporter des parents sans les enfants ? Les enfants retrouveront leurs parents plus tard), les droits des enfants français non respectés. 3 000 enfants français ont été sacrifiés.
Il dénonce la politique de Vichy, l’incurie administrative.
Les premiers convois de déportation pour Auschwitz sont partis en juin. Les dirigeants de Vichy savaient, les infos sur la BBC ne pouvaient leur échapper.
La participation de la police française a longtemps été un tabou. On ne peut accuser alors, les agents de la PP. On parlait de services nazis, de Gestapo. Laurent Joly montre bien la complicité du préfet de police et ses directeurs.
Il montre aussi que que là où les juifs étaient le plus concentrés, il y a eu moins d’arrestations, des solidarités ont joué. La rue des Immeubles-Industriels dans le 11 ème, 80 familles juives, 28 arrestations sur 130 ont eu lieu.
Un livre passionnant, une somme. À lire.
À écouter : le café de l’APHG-Bourgogne reçoit Laurent Loly
https://www.aphg.fr/Cafe-virtuel-avec-Laurent-Joly-sur-La-Rafle-du-Vel-d-Hiv
16 juillet 1942 : « Pas un nazi à l’horizon, que des flics français ! »
En deux jours près de 13 000 juifs seront arrêtés en plein Paris, dont 4000 enfants.
La Rafle du Vel d’Hiv, la honte et les larmes - mardi 12 juillet 2022, - 21h10 - France3tv. . Documentaire inédit, écrit avec Laurent Joly.
La Rafle du Vél’ d’Hiv’, la honte :
http://clioweb.canalblog.com/archives/2022/07/15/39559694.html
Les jeunes EIF, s’organisent pour récupérer les enfants laissés dans les appartements des personnes raflées.
Exposition Lest we forget. N’oublions pas...Portraits de survivants
- LÉVY Claude, TILLARD Paul, La Grande rafle du Vel’ d’hiv’, préf. de Joseph Kessel, Robert Laffont, 1967, réed. Tallandier, 2010, 332 p.
- JOLY Laurent, La Rafle du Vél d’Hiv. Paris, juillet 1942, Grasset, 2022, 400 p.
- Cabu, dessins présentés par Laurent Joly, avant-propos de Véronique Cabut, Cabu, la rafle du Vel d’Hiv, 2022
La Rafle du Vél d’Hiv’ par Cabu
« L’État contre les juifs » Laurent Joly
La Rafle du Vél’ d’Hiv’, 16 juillet 1942
Carte interactive qui représente les lieux d’arrestations de plus de 11 500 personnes.
https://veldhiv42.huma-num.fr/carte-interactive/
- Les miraculés du Vél’ d’Hiv :
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2022/07/09/le-policier-a-dit-a-ma-mere-ne-dormez-pas-chez-vous-il-y-aura-une-rafle-demain_6134061_4500055.html
Cinquantième Petit Cahier. Le camp de Drancy, vu et vécu de l’intérieur, Petit Cahier 2e série - N°20, 2014
Conférence-débat du 10 octobre 2012 : conférence de Michel Laffitte ; témoignages d’Y Lévy et V. Pérahia.
Projection-débat du 17 octobre 2012 : Drancy, dernière étape avant l’abîme, documentaire de Cécile Clairval-Milhaud ; articles de F. Bottois, M.-P. Hervieu.
Articles de : F. Bottois, M. Braunschweig, F. Christophe, M. Dubezin, É. Fulop,
M.-P. Hervieu, N. Mullier. Des estampes de Georges Horan. À la mémoire de G. Michlin.
Le camp de Drancy, cité de la Muette, vu et vécu de l’intérieur
NM