Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah

André Kirschen, "J’avais 15 ans", de Frank Cassenti

Yves Kermen et le procès de la maison de la chimie
samedi 5 mai 2018

Répression et déportation en Europe

André Kirschen

J’avais 15 ans, documentaire de Frank Cassenti, 52 min, 2008

« Le 10 septembre 1941, André Kirschen [1], qui vient tout juste d’avoir quinze ans, tire sur un sous-officier allemand à la station de métro Porte Dauphine.
"Le temps d’apprendre à vivre, il est déjà trop tard, explique-t-il. J’aurais dû logiquement mourir à quinze ans. J’ai atteint aujourd’hui l’âge respectable de 80 ans et je me penche sur mon passé".

André Kirschen image allemande du Procès de la maison de la chimie

Avant de disparaître le 29 décembre 2007, André Kirschen a raconté au cinéaste Frank Cassenti, son odyssée, celle d’une vie poignante et extraordinaire qui a traversé les heures noires de la France occupée.

André Kirschen, né en Roumanie, membre de l’Union des étudiants communistes, s’était engagé, avec son frère Bernard, en août 1940, dans l’OS une structure clandestine de combat chargée de lancer la lutte armée en France à partir d’août 1941. Jacques Duclos, qui dirige le PC clandestin, pousse les jeunes à chercher l’affrontement avec l’occupant mais sans préparation, explique Pierre Daix. Ces groupes de jeunes communistes qui s’engagent dans la lutte contre l’occupant bien avant l’invasion de l’URSS, sont particulièrement vulnérables car ce sont des bandes de copains, facilement identifiables.
La répression anticommuniste est menée par les Brigades spéciales de la Préfecture de police de Paris et les brigades régionales de la police judiciaire.
Les polices françaises sous l’occupation, Jean-Marc Berlière

Le 9 mars 1942, sept jeunes résistants communistes âgés de dix-huit à vingt-sept ans sont jugés au Palais Bourbon.
Roger Hanlet, Acher Semhaya, Robert Peltier, Christian Rizo, Tony Bloncourt, Pierre Milan, Fernand Zalkinow sont condamnés à mort et fusillés le 9 mars 1942 au fort du Mont-Valérien.

Procès de la Maison de la Chimie

Le 17 avril 1942, vingt-sept combattants français des Bataillons de la Jeunesse et de l’Organisation spéciale [2] du PCF sont jugés à la maison de la chimie.
Ils sont condamnés à mort. André Kirschen qui a moins de quinze ans ne peut pas être exécuté selon les lois allemandes. Il est condamné à dix ans de réclusion.

23 sont fusillés au mont Valérien.

  • Yves Kermen, tourneur ajusteur, syndicaliste CGT de Renault-Billancourt, responsable à la propagande à Viroflay d’octobre 1940 à mai 1941, était à l’Arc de Triomphe, le 11 novembre 1940 :
    « Notre cause est juste. Notre mort n’arrêtera pas la lutte. Au contraire, elle fera se lever à notre place des centaines de nouveaux combattants.
    « Vous pouvez nous tuer, d’autres se lèveront, et nous gagnerons la guerre ! » dit Yves Kermen à son procès au nom de ses camarades.

A la station Quai de la Rapée, où Yves Kermen [3] a rendez-vous avec France Bloch-Sérazin [4] pour des explosifs, il fait feu sur l’inspecteur Charlot, permettant ainsi à France de s’enfuir. Yves Kermen est arrêté et torturé.

  • Les représailles s’exercent sur les familles des condamnés : le 11 août, cent personnes furent fusillées à titre d’otages des parents de "terroristes" dont Naoum Zalkinow, père de Fernand Zalkinow ; Louis Thorez, frère de Maurice Thorez ; Guillaume Scordia, beau-frère du colonel Fabien, Joseph et Bernard Kirschen, père et frère d’André Kirschen.
    http://www.resistance-ftpf.net/chimie/menu.html

Otages, fusillés, massacrés sous le nazisme

Projection organisée par Nicole Dorra de Ciné-Histoire à l’Hôtel de ville de Paris.

débat avec Frank Cassenti et Gilles Perrault

Médiagraphie
Claude CAZALS, Benoît HABERBUSCH, Bernard MOURAZ,
Gendarmes et miliciens. L’implication de la gendarmerie dans les cours martiales de 1944, Tours, Éd. Transmettre, 2016, 225 p.
Pierre DAIX, Les combattants de l’impossible. La tragédie occultée des premiers résistants communistes, Robert Laffont, 2013.
Franck LIAIGRE, Les FTP : Nouvelle histoire d’une Résistance, Perrin, 2015
Albert OUZOULIAS, Les Bataillons de la Jeunesse, Les Éditions sociales, Paris, 1971
Claude PENNETIER, Les Fusillés (1940-1944), Dictionnaire biographique des fusillés et exécutés par condamnation et comme otage ou guillotinés, L’Atelier, Paris, juillet 2015.
André ROSSEL-KIRSCHEN, Le procès de la Maison de la chimie (7 au 14 avril 1942) : contribution à l’histoire des débuts de la résistance armée en France, Coll. Mémoires du XXe siècle, L’Harmattan, Paris, 2002

CERCLE D’ÉTUDE, PC N°26 – Forces de répression françaises et allemandes en France occupée. 1940-1944, 2018
https://lessor.org/wp-content/uploads/2015/03/Des-gendarmes-ont-fusill%c3%a9.pdf

Un Condamné à mort s’est échappé, film de Robert Bresson, 1956, 95 min.
DEVIGNY André, Compagnon de la Libération, Un Condamné à mort s’est échappé [5], Gallimard, 1956 »
Les FTP-MOI dans la Résistance, film documentaire de Mourad Laffitte et Laurence Karsznia, 2013, 90 min.
Une jeunesse parisienne en Résistance , film-documentaire réalisé par Mourad Laffitte et Laurence Karsznia sur l’histoire de la MOI et de toute une jeunesse qui joua un rôle majeur dans la Résistance parisienne : parmi eux Roger Trugnan, Paulette Sarcey, Henri Krasucki, Samuel Radzinski, Robert Endewelt, Marcel Rayman, Julien Lauprêtre.

Précisions : Aucun" militant communiste" de base n’abat d’officiers allemands sur ordre de la direction du PC ou de son propre chef, mais ce sont des membres de l’OS, à terme FTP, des "bataillons de la jeunesse", branche armée des JC, de la MOI, structures minoritaires d’ "engagés volontaires" communistes, dirigés ou non par des cadres intermédiaires plus aguerris ( entre autres par la guerre d’Espagne) qui font de la résistance armée à partir de l’été 41.

Les FTP- MOI, ces étrangers qui ont combattu pour la France
L’affiche rouge, Missak Manouchian
France Bloch et Frédo Sérazin film de Marie Cristiani

Convoi de prisonniers, la plupart communistes, déportés à Auschwitz du 6 juillet 1942 cf. thèse Claudine Cardon-Hamet, 1997 :
http://communismeetconflits.over-blog.com/2014/07/l-organisation-speciale-et-la-memoire-communiste.html

6500 faits de Résistance recensés en Ile-de-France, établie à partir des archives de la répression :
http://www.museedelaresistanceenligne.org/evenement.php.

[1Un portait circule sur l’Internet, c’est celui de son frère Bernard, fusillé en 1942 au Mont Valérien.

[2(l’OS, d’où devaient naître avec la MOI, les Francs-Tireurs Partisans français en 1942)

[3Joseph Kermen – 45703, son frère, est déporté à Auschwitz il fait partie des 45000 :
http://www.memoirevive.org/joseph-kermen-45703/

[4Alain Quella-Villéger, France Bloch-Sérazin. Une femme en résistance (1913-1943), éditions des femmes, 2019, p. 117 et suivantes.

[5de la prison Montluc à Lyon Le Mémorial National de la prison de Montluc