Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah

Les dessins d’Abel Pann

exposition au MAHJ
vendredi 19 septembre 2014

Abel Pann (Abba Pfeffermann) né en Lettonie, réalise des affiches populaires pendant la guerre de 1914-1918 pour renforcer le sentiment patriotique en France. Il dénonce aussi les pogroms de l’armée tsariste.

Compte-rendu de l’exposition consacrée aux dessins d’Abel Pann. Œuvres de guerre (1915-1917).

Dans le cadre du Centenaire de la Grande guerre, le MAHJ (Musée d’art et d’histoire du judaïsme) présente jusqu’au 30 novembre 2014 une exposition de dessins et lithographies d’Abel Pann (1883-1963).

Ces lithographies évoquent, tant les exactions de l’armée allemande envers les populations civiles de la Belgique et du nord de la France, sur le front occidental que celles commises par l’armée du tsar envers la population juive du front oriental.

AbeL Pann est à Marseille au début de la grande guerre et s’apprête à rejoindre Jérusalem. Bouleversé par l’écho des massacres, il renonce à son voyage et dessine une série d’affiches concernant surtout le sort des femmes et des enfants. Il désire contribuer à la mobilisation française. Ces affiches connaissent un grand succès, les plus touchantes concernent le sort des enfants.

Ainsi, sur le front occidental, outre les scènes de massacres, les dessins expriment la terreur des parents concernant ce qui pourrait arriver à leurs petits, à l’approche des casques à pointe.
« Cache-toi vite, ils arrivent » disent des parents apeurés à leurs enfants. De fait, une lithographie montre des enfants, belges ou français, servant de boucliers humains à la soldatesque prussienne.

Mais un sort bien plus funeste attend les populations juives sur le front oriental (2ème partie de l’expo). Si 500.000 Juifs servent dans l’armée du Tsar en 1914 dont 80.OOO sur le front et malgré la soi-disant bienveillance de Nicolas II envers ses sujets juifs, ces derniers, dans tous les territoires occupés par les troupes russes subissent diverses exactions perpétrées principalement par les cosaques :

Marches forcées
Déportations dans des wagons à bestiaux (Déjà !)
Civils pendus
Synagogues incendiées
Pogroms.

Les troupes du tsar semblent mener deux guerres, l’une contre les Allemands et l’autre contre les Juifs. Ces derniers survivent à l’ombre du knout des cosaques qui pourtant, étaient censés les protéger ! Même s’il faut faire la part de l’émotion de l’artiste, émotion amenant sans doute une certaine subjectivité de l’œuvre, il n’empêche que certains de ces dessins représentant le calvaire des Juifs russes, galiciens, polonais, a évoqué immédiatement pour moi la Shoah par balles 25-26 ans plus tard.

Les troupes tsaristes n’ont peut-être pas fait creuser de fosses pour y assassiner des milliers de personnes mais, à minima, l’état d’esprit était le même ; encore et toujours maltraiter, humilier la population juive.

Abel Pann a voulu exposer une cinquantaine de lithos retraçant les souffrances de cette population mais, à la demande de l’ambassadeur de Russie le gouvernement français en a interdit l’exposition et la reproduction.

Par son œuvre de dessinateur A.Pann voulait soutenir les alliés, dont l’empire russe, mais le paradoxe était que favoriser la victoire de la coalition revenait à prolonger la souffrance de la population juive. Cruel dilemme !

Maintenant que plus personne ne peut nous interdire de voir ces dessins, allons-les regarder afin de ne jamais oublier que les prémisses de la Shoah ont commencé bien avant la Seconde guerre mondiale.

Catherine Monjanel.

oeuvres exposées :
http://www.mahj.org/fr/3_expositions/expo-Abel-Pann-diaporama.php?niv=2&ssniv=2

Novembre 2014


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