Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah

Famille GANON

samedi 4 décembre 2021

Renée Ganon, 14 ans, et Lina, 13 ans déportées avec leurs grands-parents, Berla Hakim, 49 ans et Isaac Hakim, 74 ans.

Renée et Lina sont nées à Rouen, Renée, le 25 février 1930, Lina le 24 août 1931. Elles habitaient au 40 rue Armand Carrel, avec leur mère, Germaine Ganon, née Hakim, le 8 mai 1907, à Paris, et leur père, Nissim Ganon, né le 8 août 1905, à Aydin en Turquie. Germaine et ses deux filles sont de nationalité française, puisque nées en France.

Linda Ganon, leur grand-mère, a quitté Aydin et est partie pour la France en 1927, après la mort de son mari, Aslan. Elle vit à Rouen, entourée de ses enfants et de leur famille. Ils habitent tous dans les rues avoisinant la place Saint Marc et se voient quotidiennement.

À la déclaration de guerre, le père, Nissim, s’engage dans l’armée française et est incorporé dans le 34ème régiment d’artillerie à Rouen. Il est fait prisonnier le 18 juin 1940 et détenu dans le Frontstalag n°204 à Amiens d’où il s’évade en juin 1941. Il revient à Rouen, mais emmène sa famille en zone sud, pensant y être plus en sécurité. Ils s’installent à Toulouse, au 11, rue Jean Pégot.

Ils entrent dans la Résistance, dans un réseau d’évasion, le réseau Andalousie. À l’été 1943, par le biais de ce réseau, Nissim Ganon rejoint l’armée de Libération en Afrique du nord, via l’Espagne. Germaine Ganon, poursuit ses activités d’agent de liaison dans le groupe CASA, sous le pseudonyme de « Maine ». Elle héberge des Juifs recherchés et des agents du réseau transitant par Toulouse. Lina et Renée sont en quelque sorte « les petites mains » du réseau, apportant des messages ou des tracts à des membres du réseau . Le 18 janvier 1944, Germaine Ganon est arrêtée par la Gestapo ainsi que 3 agents du réseau et est incarcérée à la prison Saint-Michel pendant 1 mois. Lors des interrogatoires, malgré les tortures, elle ne livre aucun nom et sauve ainsi la vie de ses camardes et des chefs du réseau. Identifiée comme juive, elle est transférée au camp de Drancy le 17 février 1944, puis déportée le 7 mars 1944 par le convoi 69 au centre de mise à mort de Birkenau. Seules cinq femmes déportées dans ce convoi sont survivantes en 1945.

Suivant les conseils de leur mère, Lina et Renée se rendent chez leurs grands-parents maternels, Berla et Isaac Hakim. Couturiers à domicile, ils habitent au 20 ter boulevard Gambetta, à Vichy. Mais Berla Hakim juge plus prudent d’envoyer Lina et Renée à la campagne. Le 27 mai 1944, alors qu’elles rendaient visite à leurs grands-parents ils sont tous les quatre arrêtés. Ce jour-là et les jours précédents, la Gestapo procède à plusieurs arrestations de Juifs à Vichy. Ils sont internés à la prison de la Mal Coiffée à Moulins, puis au camp de Drancy où ils entrent le 2 juin. Ils passent donc près d’un mois dans ce camp d’internement avant d’être déportés le 30 juin 1944. Ils sont conduits à la gare de Bobigny avec 1153 internés destinés à être déportés vers le centre de mise à mort d’Auschwitz-Birkenau. C’est le 76ème convoi de déportés juifs parti de Drancy.

Le voyage qui dure quatre jours, par une chaleur torride, est particulièrement épuisant pour ces familles entassées dans un wagon à bestiaux plombé. Le 4 juillet, le convoi entre à l’intérieur du camp de Birkenau sur la « rampe d’Auschwitz » où a lieu la sélection. Les travaux de Serge Klarsfeld ont permis d’apprendre que 223 femmes sur 495 et 398 hommes sur 654 sont déclarés « aptes » pour le travail . Ce sont généralement les plus jeunes. Le nombre de déportés désignés pour ce travail d’esclave, plus de la moitié, est beaucoup plus élevé que celui des transports précédents car Les camps deviennent, en 1944, un vivier de travailleurs pour l’industrie de guerre. L’autre moitié du convoi, les malades et les enfants, dits « inaptes » au travail, sont gazés dès l’arrivée.

Ce dut être le cas d’Isaac et Berla Hakim, compte tenu de leur âge. Par contre, Renée et Lina sont entrées dans le camp, malgré leur jeune âge. ll semble que Renée paraissait plus que ses 14 ans. Selon les documents d’ archives du camp d’Auschwitz, elles se trouvaient dans la baraque 22b du camp de femmes de Birkenau au mois d’octobre 1944. Elles avaient pour numéro matricule le A-8589 et le A-8590, preuve qu’elles rentrent ensemble au camp. Après cette date, on ne trouve plus trace d’elles. Lina, Renée, et Germaine Ganon, Isaac et Berla Hakim ont ainsi été assassinés à Auschwitz.

Le père de Lina et Renée, éploré par la disparition de sa famille, a multiplié les démarches pour faire reconnaître les activités de sa femme et de ses filles dans la résistance à Toulouse. En 1954, le titre de déportée résistante est accordé à Germaine Ganon, mais aussi à Lina et Renée, malgré leur jeune âge. Germaine a été ensuite décorée de la croix de guerre et de la Légion d’honneur.

Renée Ganon

Lina
à l’âge approximatif de leur déportation. Fonds privé

Sources : DAVCC Caen AC 21P 453390- Témoignages des cousines de Lina et Renée Ganon.

Elles étaient juives et résistantes-Convoi 76, Chantal Dossin

Chantal Dossin

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