Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah

Liquidation du camp des Tsiganes à Auschwitz-Birkenau

Commémoration de la Zigeunernacht, nuit 2 au 3 août 1944
samedi 30 juillet 2016

"En souvenir de la Zigeunernacht où, dans la nuit 2 au 3 août 1944, les nazis ont décidé de la liquidation du camp des Tsiganes d’Auschwitz-Birkenau. Nuit où 2897 Sintis et Rroms, hommes, femmes et enfants, de diverses nationalités dont des voyageurs français, ont été exterminés dans les chambres à gaz. " Témoignages du général André Rogerie et d’Ernest Vinurel

Les Tsiganes assassinés à Auschwitz-Birkenau

Général André Rogerie est un des témoins de la disparition des Tsiganes en août 1944

  • Témoignage du général André Rogerie, tiré de son livre "Vivre c’est vaincre" écrit en 1945 [1]

Nous sommes couchés comme à l’accoutumée quand tout à coup le bruit de camions roulant sur la route éveille notre attention. Nous percevons distinctement, maintenant, que les camions pénètrent dans le camp voisin, appelé camp des Tziganes. Là, des familles entières de Tziganes vivent ensemble, et ce soir, le roulement des voitures vient de nous faire comprendre l’horreur du sort qui leur est réservé. Hommes, femmes, enfants, tous entièrement dépouillés de leurs vêtements, sont entassés dans les camions. Les cris, les vociférations nous parviennent très nettement. Les S.S. hurlent, les femmes ont des crises de nerfs, les enfants pleurent, et les camions, pleins à craquer de leur butin, partent maintenant à toute vitesse vers les fours crématoires. Dans quelques instants seront consumées toutes ces vies humaines qui, aux yeux de l’Allemagne, ont commis le crime immense et impardonnable d’être Tziganes.
Les cris ont cessé. Je vois, par la lucarne du bloc, la lune qui est actuellement dans sa plénitude. Tout à coup me revient à la mémoire une phrase oubliée depuis bien longtemps que j’ai lue autrefois dans Chateaubriand : « La lune prêta son pâle flambeau pour cette veillée funèbre. » André Rogerie

  • Témoignage d’Ernest Vinurel, recueilli par Bernard Kleindienst [2]

Je dois vous dire que notre lieu de rencontre avec les Tsiganes était les toilettes, j’appelle les toilettes, des trous creusés dans du béton, on s’asseyait d’un côté de l’autre, hommes et femmes étaient mélangés.
Ils m’ont raconté qu’il y avait beaucoup de Tsiganes qui sont arrivés à Auschwitz avec l’uniforme de la Wehrmacht, parce que pendant longtemps, ils avaient servi dans la Wehrmacht. Certains étaient même gradés, caporaux ou sergents. Les chefs de blocks étaient des Tsiganes, anciens de la Wehrmacht. Apparemment, les Tsiganes étaient moins maltraités que nous. Ils n’allaient pas travailler et je sais qu’ils avaient pour les enfants, une sorte d’école, de jardin d’enfants.
Nous, nous étions tondus immédiatement à notre arrivée, eux, non, ils avaient gardé leurs cheveux. Ils avaient pu garder leurs vêtements aussi. Ils étaient en vêtements civils. Ils n’avaient pas le costume rayé. Au niveau de la nourriture, ils avaient pratiquement la même nourriture que nous, c’est-à-dire insuffisante, mais comme les Tsiganes ne travaillaient pas, il me semblait que la nourriture les gonflait plus qu’elle ne les nourrissait. Le soir, des fois, des orchestres tsiganes jouaient, ils avaient leurs instruments. De la belle musique !
Moi, en tant que Juif, ce qui m’a toujours étonné, c’était les rapports entre les SS du camp et les Tsiganes. Historiquement et politiquement, les Tsiganes n’étaient pas considérés comme des adversaires du régime nazi, ils ne se sont jamais préoccupés de politique. Et les SS les prenaient pour des "rigolos" qui riaient toujours, qui jouaient de la musique, etc.
Si les SS ont crié les mots d’ordre : " Die Juden sind unser Unglück !" (Les Juifs sont nos malheurs), etc., ils n’ont jamais crié : "A bas les Tsiganes !", Mort aux Tsiganes !"
II n’y avait jamais eu cette animosité populaire, une haine contre les Tsiganes comme il y a eu contre les Juifs.
J’ai vu des SS se balader avec des jeunes filles tsiganes dans l’allée du camp, bras dessus, bras dessous. Ce qui ne les a pas empêchés, quand l’ordre est venu, de les exterminer tous, en une seule nuit, au début d’août 1944 ! Ernest Vinurel [3].

Marie Jo, Ernest, Saint Macary

Le mémorial d’Auschwitz nous informe que les récents travaux des historiens portent à 4300 personnes le nombre des victimes tsiganes assassinées la nuit du 02.08.44 essentiellement des femmes, des enfants, des personnes âgées. (2019)

  • Journée européenne de commémoration de l’Holocauste des Roms

https://europa.eu/rapid/press-release_STATEMENT-19-4869_en.htm

Le Parlement européen a adopté une résolution en avril 2015 reconnaissant « le fait historique du génocide rom pendant la Deuxième guerre mondiale » et a proposé de faire du 2 août la Journée européenne de commémoration de l’Holocauste des Roms, une mesure déjà prise dans certains Etats membres. Pas en France ! C’est pourquoi nous continuons de porter cette exigence.

Cérémonie du ravivage de la flamme

Cette année encore une cérémonie du ravivage de la flamme sera portée par l’Association des Fils et Filles d’Internés du Camp de Saliers, et La Flamme sous l’Arc de Triomphe, avec drapeau et dépôt de gerbe, en soutien avec les associations composant le Collectif National des Associations de Citoyens Itinérants et tout ceux qui souhaiteront s’y associer.
Monsieur Philippe POTENTINI, représentant du Conseil de l’Europe.
Monsieur Frédéric CHARLET, directeur de projet auprès de la Directrice générale à l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) sera présent au ravivage de la Flamme pour représenter l’État.
l’European Eoma Rights Center (EERC) sera représenté par Madame Radost ZAHARIEVA
le Collectif National des Associations de Citoyens Itinérants (CNACI) par Monsieur Milo DELAGE,
l’Association des Fils et Filles d’Internés du camp de Saliers (AFFICS) par Gigi BONIN,
l’ONAC du Var par Monsieur Samson GARGOWITZ
l’Association Différence Gens du Voyage, par Florent RAPENNE,
l’Association Culturelle Gitane par Madame Jacqueline-Marie LUCAS,
André Sauzer, vice-président de l’adgve (association des gens du voyage de l’Essonne)
ainsi que tout ceux et celles qui se joindront à nous.

Pour en savoir plus :
Les Tsiganes dans l’Europe occupée : entre persécutions et génocide
Parmi les camps les plus importants où sont internés "nomades", "forains", "romanichels", "bohémiens", "tsiganes" ou "roms" : Poitiers, Montreuil-Bellay, Rennes, La Forge à Moisdon-la-Rivière, Choisel, Linas-Montlhéry, Mulsanne, Arc-et-Senans, Saint-Maurice-aux-Riches-Hommes.
L’internement des Tsiganes en France 1940-1946, la mémoire et l’oubli

Mardi 2 août 2016, une cérémonie du ravivage de la flamme sera portée par l’Association des Fils et Filles d’Internés du Camp de Saliers [4]

3e Commémoration Nationale en hommage aux nomades morts pour la France/ Journée européenne de commémoration de l’holocauste des Roms,
17 h 00 - 19 h 00
https://www.facebook.com/events/1713705728889733/?active_tab=posts

Convoi Z
https://dailynord.fr/2009/04/convoi-z/
Juillet 2016, 2019

[1ROGERIE André, Vivre c’est vaincre, (écrit en 1945), Maulévrier, éd. Hérault, 1988, 106 p., (réed. et disponible à l’UDA)

[2Réalisateur du documentaire "Les Tsiganes et le 20 ème siècle."

[3Ernest Vinurel, Rive de cendre. Transylvanie, Auschwitz, Mauthausen, Préface de Daniel Simon, Mémoires du XXe siècle, L’Harmattan, 2003, 356 p.

[4L’Association des Fils et Filles d’Internés du camp de Saliers, créée le 14 juillet 2014 à Arles. Cette association a pour objet de faire respecter, défendre et promouvoir la mémoire des interné(e)s et déporté(e)s tsiganes du Camp d’Internement pour Nomades de Saliers (Bouches-du-Rhône), et dans d’autres lieux de rétention.