Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah

Le soulèvement du Ghetto de Varsovie ; le pianiste

conférence de Larissa Cain

« Nous ne voulons pas sauver nos vies. Personne ne sortira vivant d’ici. Nous voulons sauver la dignité humaine ».

Compte-rendu

Conférence- débat avec Larissa Cain, « une enfance au Ghetto » Projection du film : Requiem pour 500 000, Jerzy Bossak et Waclaw Kazmierczak, documentaire de 1963. Elisabeth Brisson, une séquence pédagogique : Le pianiste de R. Polanski.Intervention de témoins sur le ghetto : Mme Janine Pieprz-Den, Mme Liliane Goldberg. Michel Borwicz a posé le problème ainsi :« D’ores et déjà, pour les Juifs, la question n’était plus : vivre ou mourir, mais comment mourir ? » C’était le 23 avril 2003

Chronologie : http://warszawa.getto.pl/index.php?show=kalendarium&lang=en

Tram et policiers juifs, Bundesarchiv
Varsovie
1- Projection du film Requiem pour 500 000


film polonais, de Jerzy Bossak et Waclaw Kazmierczak, documentaire de 1963.
Lorsque les Allemands entrent en Pologne, ils constituent le ghetto de Varsovie dans lequel il y plusieurs classes de population. Des points de passage sont contrôlés par la police juive, polonaise et allemande. Les juifs croient encore que la mort n’est pas le sort de tous. Certains sont déportés, mais d’autres espèrent trouver un travail dans une entreprise allemande. On voit la police juive rassembler son contingent de 5 à 6000 personnes par jour, qu’elle dirige vers l’Umschlaglatz, la place des transbordements.

Certains refusent la capitulation, organisent de la contrebande, des journaux, des concerts. Les juifs de Varsovie se soulèvent le 19 avril 1943 à l’appel de l’Organisation juive de combat. « En dépit de nos engins blindés des juifs ont réussi à nous repousser » écrit Jürgen Stroop. Par le feu, le ghettto a cessé d’exister.
Les images ont été tournées par des soldats allemands, la musique est insupportable, ce film est daté politiquement, mais ces documents sont émouvants.








2- Les ghettos, quel espace pour une résistance ? par Maryvonne Braunschweig  :

Dès l’invasion de la Pologne le 1er septembre 1939, 2 000 000 de Juifs se trouvent sous la férule allemande, après l’invasion de l’URSS en juin 1941, ils sont 5 000 000. Ils forment un peuplement massif et concentré dans plus de 16 000 localités (350 000 Juifs à Varsovie soit l’équivalent de tous les Juifs présents en France à la même date).
Dès le début de l’occupation allemande, ils sont chassés de centaines de localités, expropriés, terrorisés, expulsés vers les grandes villes. Dès le 23 septembre 1939, le gouverneur allemand Frank impose le port d’un brassard blanc et bleu, avec étoile à six branches, à tous les Juifs de plus de 10 ans (brassard qui deviendra ensuite l’étoile jaune cousue sur la poitrine dans toute l’Europe occupée), puis en octobre, il institue les travaux forcés pour tous les Juifs de 14 à 60 ans. Ce même mois d’octobre il crée les premiers ghettos où sont rapidement regroupés de force les populations juives de la ville. De « quartiers réservés aux Juifs », ces ghettos deviennent même des espaces complètement bouclés où les Juifs sont déportés, concentrés, enfermés à l’intérieur de murs infranchissables.
Les ghettos peuvent être considérés comme une forme de lieu de concentration nazi. Ils ont été créés dans toute l’Europe orientale (Pologne,États baltes et territoires soviétiques occupés) dès le début de l’occupation de ces territoires par les Allemands.
Peu à peu les ghettos devinrent des "zones affectées à la résidence des Juifs avec interdiction de la quitter."La seule institution comparable au ghetto nazi était le camp de concentration nazi" où selon les propos de David Rousset "la mort vivait parmi les concentrationnaires à toute heure de leur existence". » in La guerre contre les Juifs, 1933-1945 de Lucy Davidowicz, Hachette.

Dans le ghetto, en plus du sentiment d’isolement, d’emprisonnement, la mort règne en maître : faim, travail obligatoire, maladie.
Le Juif se trouve incarcéré dans le ghetto sans avoir commis de crime, sans avoir transgressé les règles ordinaires de la vie en société.
Les ghettos sont situés dans les coins les plus vieux, les plus délabrés, sans aménagements urbains essentiels (égouts, sanitaires, éclairage..). Le surpeuplement entraine saleté, vacarme permanent.
Une pièce en moyenne est attribuée pour sept personnes qui dorment par terre ; la pièce sert aussi pour faire la cuisine, pour manger. La propreté est impossible. Les ordures qui s’entassent partout entrainent des maladies, des épidémies.
La politique allemande est d’affamer les Juifs.
50 000 Juifs d’Allemagne, Autriche, Tchécoslovaquie sont déportés dans ces ghettos.

" Isoler, diffamer, humilier, briser et anéantir", écrit Eugen Kogon, à propos des camps nazis. C’est bien le cas des ghettos.

3- Larissa Cain

Larissa Cain fait allusion à Joe J. Heydeckert, un soldat de la Wehrmacht qui a fait des photos des habitants du ghetto en 1941, montrant leurs conditions de vie. ( quelques photos sont exposées dans la salle.)
Le 12 octobre 1940, les nazis ordonnent la création du ghetto.
Larissa Cain avait 8 ans lorsque le ghetto est bouclé le 16 novembre 1940. Une passerelle relie en 1941 le grand et petit ghetto. Les habitants s’entassent à 8 personnes par pièce. Sa maison était incluse dans le petit ghetto.

Plan du ghetto, Wiki Communs

Les Allemands ont imposé un Judenrat [1]de 24 membres dirigé par Czerniakow. La police devait maintenir l’ordre. Dans le film il est dit que les juifs étaient dociles. Mais il y avait une résistance civile. La première réponse du ghetto, c’était survivre. Ils ont organisé des cantines avec l’aide du Joint américain.
Un comité des immeubles se forma, servant d’entraide sociale, avec une cantine, distribution d’habits pour les enfants. L’aspect de solidarité a été très important.
Les écoles étaient interdites en Pologne. Il y avait au ghetto, toute une vie clandestine, des écoles, des lycées, une faculté de médecine qui a fait un travail sur l’action de la faim sur l’enfant.
Il y avait une vie politique très importante. Avant la guerre la société juive était très politisée. Il y avait un parti religieux orthodoxe sioniste, il y avait le Bund (parti socialiste juif) qui recrutait parmi les ouvriers juifs. En effet, la majorité des juifs était extrêmement pauvre. Il y avait les partionnistes. Il y avait le PC polonais, interdit par Staline en 1938, ressuscité en 1942. Il y avait des journaux.
Chaque parti politique avait ses mouvements de jeunesse. Ces jeunes deviendront les combattants du ghetto.
Ces jeunes s’échappent du ghetto, parcourent la Pologne, vont dans la partie annexée par l’URSS, circulent pour transporter des informations, des tracts, de l’argent, des armes et combattre dans d’autres ghettos.
Par exemple, lorsque Hitler attaque l’URSS le 22 juin 1941, la Wehrmacht est suivie par les Einsatzgruppen. Immédiatement 1 million de juifs [et les Tsiganes] sont massacrés. En octobre, la nouvelle de ces massacres parvient au ghetto. Une émissaire part à Wilno, Frumka. D’abord, il faut qu’elle sorte du ghetto, avec une pelle, comme quand on va au travail, ce qui était très dur. Il faut qu’elle s’écarte du groupe, enlève son brassard ( obligatoire à partir de 12 ans à Varsovie), dans la partie polonaise.
Il n’est pas question de prendre le train, c’était l’endroit le plus facile pour se faire attraper. Elle fait des kilomètres à pied (400). Quand elle arrive, fin janvier 1942, Wilno a perdu 20 000 juifs fusillés dans les forêts de Ponary. Elle se rend en Polésie, en Volhynie [2]

Le « massacre de Volhynie »,, ( Bielorussie, Ukraine), il n’y a plus rien, plus de communautés juives.
Elle écrit dans une lettre parvenue à Genève : « Je me sentais comme le fossoyeur du peuple juif. »

Le ghetto pense que les Allemands ont commis ces massacres parce que c’étaient des territoires occupés par les communistes. On ne prend pas la mesure que c’est le début de la "solution finale". On pense que « le monde libre ne laissera pas faire à Varsovie ce qu’ils ont fait à Wilno ».

- La première résistance armée.

Joseph Lewartowski a été envoyé par les Russes pour reconstituer le PC et créer un deuxième front contre les Allemands. Il est l’initiateur de la première organisation, le Front antifasciste, avec des communistes et des partis sionistes de gauche, en mars 1942. Cette organisation est déjà démantelée par les Allemands en mai. Ils avaient déjà formé des groupes de combat. Ils espéraient recevoir des armes. Les groupes sont dissous, ceux qui ont été arrêtés sont fusillés, l’organisation est anéantie.
Pendant ce temps, Treblinka est prêt. Après avoir gazé à Chelmno, dans des camions, des chambres à gaz de 250 personnes ont été construites à Treblinka.
Le 22 juillet 1942, c’est "la grande déportation" vers Treblinka.

https://www.bs-anne-frank.de/mediathek/blog/heute-vor-80-jahren-beginn-der-deportationen-aus-dem-warschauer-ghetto juillet 2022.
Sur des affiches, les Allemands promettent 3 kg de pain et 1 kg de confiture pour les volontaires qui se rendront sur l’Umschlagplatz. On disait que les familles ne seraient pas séparées. Les Lettons, les Lituaniens, les Allemands et les Ukrainiens qui ont reçu une formation spéciale à Trawnicki, encerclaient et criaient autour des immeubles « Raus », « Alle Juden unten ».
Pour le moindre écart, on tuait ces « juifs dociles », mais ces gens étaient des civils, il fallait que cela se passe vite. « Schnell  ».
Que faire contre une force aussi importante ? Il y a des gens qui se sont jetés contre les Allemands. Samuel Breslau avec un couteau à cran d’arrêt, est abattu.
Le 28 juillet se crée le premier noyau de l’Organisation juive de combat,(OJC) avec trois organisations de jeunesse sioniste, Hashomer Hatsaïr, Dror, Akiba. Ils décident d’acquérir des armes. Ils ont des revolvers.
Le ghetto veut savoir. Zalman Friedrich, un membre du Bund, va vouloir savoir ce qui se passe avec les trains qui partent à Treblinka. Grâce à des cheminots polonais, il part à Sokolow, près de Treblinka. Il rencontre un membre du Bund qui vient de s’échapper de ce camp qui est dans une région boisée, à l’écart des villes. David Nowodworski lui explique que les trains s’arrêtaient à la première barrière et là les déportés devaient laisser près du train leurs bagages. Puis des jeunes, forts, devaient transporter ces biens dans des hangars avant qu’ils soient expédiés en l’Allemagne. Cet évadé, raconte comment cela se passe ensuite : quelques jeunes sont sélectionnés pour les travaux, et on gaze les femmes et les enfants le jour, les hommes, la nuit.
Le Bund publie dans son bulletin une mise en garde contre les transferts à l’Est. « Ne vous laissez pas emmener. Ne les laissez pas vous anéantir. »
. Qui savait quoi, quand et comment ?
Comment envisager qu’on pouvait organiser des usines de mort ? On ne pouvait penser à une extermination totale.
Le 13 septembre la déportation prend fin. Le 21, les Allemands déportent les policiers juifs.

Après l’« Aktion », le ghetto devient un camp de travail. Plus de 300 000 juifs ont été gazés à Treblinka. Il reste 50 000 juifs à Varsovie dont 35 000 travaillent dans les trois secteurs du ghetto. Certains se cachent, « les chats sauvages ».
Le ghetto est partagé en trois zones : le ghetto central, le secteur des "shops" avec les entreprises allemandes Schutlz et Többens, et le secteur de la fabrication des brosses. Il est interdit de se déplacer entre les trois, sauf pour le travail.
C’est à ce moment là que se crée un comité de coordination de l’OJC, le 20 octobre.
L’OJC délègue des membres des différents ghettos. Il faut des armes.
Ils envoient Arié Wilner, un grand blond aux yeux bleus, à la résistance polonaise. Il y a l’armée nationale qui dépend de Londres et l’armée de l’intérieur. Les Polonais sont très patriotes, mais malheureusement très antisémites. Dans le film, on parle du parti ouvrier, c’est le PCP, le parti communiste polonais, ils sont peu nombreux, mais c’est eux qui ont le plus aidé à acquérir des armes. Arié Wilner essaie d’entrer en contact avec la résistance polonaise, mais très peu d’armes leur sont parvenues, certaines étaient défectueuses. Il a été pris et torturé par la Gestapo. Il a fallu que des émissaires s’adressent à des revendeurs au marché noir.
Un jeune bundiste, Michal Klepfiz, est envoyé du côté polonais pour entrer en contact avec un ingénieur de l’armée polonaise, qui lui apprend à fabriquer des grenades et des bouteilles explosives.
Il fait entrer au ghetto du pétrole et des produits chimiques pour fabriquer des explosifs : en février 1943, Michal à cheval sur le mur du ghetto, faisait passer des bidons pour fabriquer des armes dans le ghetto.
Se mêlant à des travailleurs forcés, Frumka a mis ses armes au fond de son panier recouvert de pommes de terre. L’Allemand de garde n’ a rien vu. Frumka peut rentrer dans le ghetto. Le 3 septembre, Regine Justman se fait prendre et elle est arrêtée avec ses armes.

"Regards sur les ghettos"

- La résistance du ghetto de Varsovie. 19 avril 1943-19 mai 1943

mémorial des combattants du ghetto

La première révolte en janvier 1943
Le premier soulèvement du ghetto de Varsovie, le 18 janvier 1943, est une réponse spontanée de l’OJC à la deuxième « Aktion ». Les Allemands veulent mettre fin au ghetto. Mais s’ils déportent environ
6 000 personnes et en tuent mille, des Allemands sont tués, alors ils s’arrêtent 4 jours plus tard. Le ghetto sait qu’il y aura une dernière déportation. Les combattants s’organisent. Ils fabriquent des armes.
La propagande nationale-socialiste avait contribué à désigner les Juifs comme des ennemis du grand Reich. Les Allemands les présentaient pourtant comme des lâches. Cette idée était tellement bien ancrée dans l’esprit des Allemands qu’elle explique leur surprise. Lors de l’insurrection, le général allemand Jürgen Stroop en fait lui-même état dans son rapport :
« … Lors de la première pénétration (allemande) dans le ghetto, les Juifs et les bandits polonais ont réussi, grâce à une attaque préparée, à repousser les unités (allemandes) participant à l’action, y compris les chars et les voitures blindées de protection. »

Radio-message transmis à Londres en janvier 1943 :
"Au mois de janvier, les Allemands ont commencé la liquidation du ghetto de Varsovie. La population a résisté, les armes à la main. Quelques dizaines d’Allemands ont été tués. Plusieurs centaines de Juifs sont tombés (…). Au bout de trois jours ils ont interrompu les déportations. Dans toute la Pologne la liquidation [des Juifs] se poursuit. (…) Ils liquideront le ghetto de Varsovie à la mi-février. Adressez-vous au Pape en vue d’une intervention officielle." (…)

La deuxième révolte, le soulèvement du 19 avril 1943
Mordechaï Anielewicz fait afficher des placards dans le ghetto, le 18 avril 1943, à la veille de l’insurrection où il est écrit :
« Périr avec honneur ! Les hommes aux armes, les femmes et les enfants aux abris !
Les cinq membres de l’état-major de l’OJC,à la veille de l’insurrection, une poignée de rebelles qui ne veulent pas se laisser égorger :
Mordechaï Anielewicz, né en 1919, a 24 ans
"Dans le conflit idéologique qui structure le pays, le vrai héros soutient le projet sioniste. Le vrai héros du ghetto, pour Israël, c’est Anielewicz." "
http://www.lemonde.fr/europe/article/2008/04/19/marek-edelman-le-revolte-du-ghetto_1036036_3214.html
Itzhak Cukierman, né en 1914, a 29 ans
Hersz Berlinski, né en 1908, a 35 ans
Michal Rozenfeld, né en 1916, a 27 ans
Marek Edelman, né en 1921, a 22 ans, membre du Bund, le n° 2 après Anielewicz
"Nous nous battrons pour que, de l’autre côté du mur, on entende que nous sommes vivants."
Marek Edelman et le soulèvement du ghetto de Varsovie
Le 19 avril 1943, les Allemands entrent en tenue de combat, dans le ghetto central. Ils sont attaqués par les combattants juifs. Au bout de quarante minutes ils se retirent de ce secteur et à 14h il n’y a plus d’Allemands.- Il y a soixante ans, le 23 avril, c’était le quatrième jour de l’insurrection. -
Témoignage de Franciszka Rubinlicht :
« Voici une jeune fille de seize ans qui attache à sa ceinture quelques grenades appelées bouteilles, sort sur le balcon, verse sur sa tête de l’essence, met le feu à ses cheveux et se jette sur un tank. Heureusement avec succès, car elle l’a détruit en périssant avec les servants.

Les kashariyot : « connexion », présentaient des « traits aryens ».
Renia Kukiełka, informer les camarades de la ŻOB de Będzin
Feigele ( Vladka) Peltel, faire rentrer des armes
kashariyot : « connexion »
Rozka Korczak
La lutte a changé de nature. Les Allemands attaquent secteur par secteur : le 20 avril c’est le secteur des brosses, le 21 le secteur des shops, le 22 les industriels allemands ne peuvent plus protéger leur secteur et leurs machines. Le 23 les Allemands renoncent à combattre. Ils vont liquider le ghetto par le feu et le gaz. Ils utilisent des lance-flammes. Dans le film, on voit une femme qui se jette d’un immeuble en flammes.)
Les juifs se replient dans des cachettes souterraines, les Bunkers. Ils sortent la nuit pour attaquer les patrouilles.
Le ghetto est anéanti.
Le monde libre est resté passif, alors que les juifs ont combattu 27 jours.
Un millier de combattants, pratiquement sans armes, réussit à immobiliser pendant 27 jours la « meilleure armée du monde ». Anielewicz voulait sauver « l’honneur juif » écrit Raul Hilberg
«  Nous ne voulons pas sauver notre vie. Personne ne sortira vivant d’ici. Nous voulons sauver la dignité humaine. » Jurek (Arie Wilner)
L’insurrection a commencé le 19 avril 1943. Mordechaï Anielewicz s’est suicidé avec d’autres camarades, le 8 mai 1943 dans son Bunker du 18, rue Mila. Pour Marek Edelman, le suicide collectif du 18 rue Mila n’est qu’un accès d’“hystérie collective”.
http://www.revue-ballast.fr/marek-edelman-lheretique/

Tumulus Mila 18
photo Daniel Nicolle

Appel de l’OJC du 23 avril 1943  :
« Polonais, Citoyens !
Soldats de la Liberté !
A travers le grondement des canons de l’armée allemande qui sont en train de bombarder nos maisons, nos mères, nos femmes et nos enfants.
A travers le crépitement des mitrailleuses que nous enlevons de haute lutte aux lâches gendarmes et aux S.S.
A travers la fumée des incendies et des flots de sang qui ruissellent dans les rues écrasées du ghetto de Varsovie,
Nous prisonniers du ghetto, nous vous envoyons notre cordial et fraternel salut.
Nous savons que c’est avec douleur, avec des larmes de compassion, avec respect, que vous assistez à la bataille que nous livrons depuis plusieurs jours à l’atroce occupant. C’est avec angoisse que vous vous demandez quelle en sera l’issue.
Sachez donc qu’aujourd’hui comme hier, chaque seuil du ghetto sera une forteresse. Sachez que tous, nous voilà prêts à mourir au combat, et sans jamais nous rendre ! Comme vous, nous désirons la revanche, nous voulons le châtiment de tous les crimes perpétrés par l’ennemi commun.
Nous nous battons pour notre Liberté et la vôtre, pour notre honneur et le vôtre,
Pour notre dignité humaine, sociale, nationale, et pour la vôtre !
Vengeons les crimes d’Auschwitz, de Treblinka, de Belzec, de Maïdanek !
Vive la fraternité d’âme et de sang de la Pologne combattante !
Mort aux bourreaux, mort aux tortionnaires !
Vive le combat à vie et à mort contre l’occupant ! »

Témoignage d’Emanuel Ringelblum( (chroniqueur, survivant à l’insurrection du ghetto, avec son équipe coordonne la préservation de 25 000 documents) :
« Je me souviens de ma conversation avec le chef de l’Organisation Juive de Combat, Mordechaï Anielewicz, tombé pour la cause au mois d’avril. Il évaluait bien les chances de la lutte inégale, il prévoyait la destruction du ghetto, il était sûr que ni lui, ni ses soldats ne survivraient à la liquidation du ghetto, qu’ils périraient comme des chiens abandonnés et que personne ne saurait l’endroit où ils reposeraient… On se rendait compte que c’était une lutte de "mouches contre un éléphant", mais l’honneur national dictait aux Juifs la nécessité de résister et de ne plus permettre de se laisser mener à l’extermination. »

Prison Pamiak, Varsovie
Photo Daniel Nicole

Les témoins

Mme Janine Pieprz-Den, avait 15 ans dans le ghetto :
Les premiers jours de l’occupation étaient supportables malgré les humiliations, les restrictions, le brassard avec l’étoile de David, les hommes en danger d’être attrapés pour les travaux forcés. Les restaurants, les théâtres étaient interdits aux juifs.
1940 création du ghetto. Chaque appartement de 5 pièces accueillait 5 familles. Les gens devaient prendre le strict minimum, dans un balluchon. Avec quatre personnes dans une pièce on ne pouvait amasser beaucoup de choses. Les gens ont perdu 80 % de leurs biens.
Pour organiser la vie, dans l’immeuble, il fallait faire des règles du jeu. Il y avait une carte à côté de la sonnette : pour Mme L., sonnez une fois. M. K., sonnez 2 fois, le docteur, sonnez 3 fois. Puis une rafle a eu lieu et tous ont disparu. Restait la carte. Des camions sont venus chercher les gens.
Le 15 novembre 1940 on a fermé le ghetto hermétiquement. Les gens se sont retrouvés au chômage. Ils se sont retrouvés coupés de leurs sources de revenus.
Tous les juifs qui habitaient autour du ghetto se sont retrouvés dans la misère. Les artisans n’avaient pas leurs outils de travail, n’avaient rien.
Des comités de maison se mettent en place. C’était par exemple obliger les locataires à veiller à ce qu’aucun objet obstrue la porte vers l’abri.
Dès la premier jour, le comité de maison a fait une réunion des locataires : 80 personnes. On a tant d’enfants à nourrir. Il faut les nourrir tout de suite. Les gens se sont proposés. Deux fois par semaine, venait manger chez sa grand mère, un petit garçon au crâne rasé. Elle lui donnait quelque chose pour le petit frère. Un jour, il n’est plus venu.
Ensuite ses parents ont loué une boutique pour faire une pâtisserie.
Un pain 5 zlotys. Un gâteau 50 groschens. On pouvait se nourrir avec deux gâteaux. 2000 gâteaux par jour venaient par contrebande.
En outre des clients, ses parents vendaient au local où jouait le pianiste Wladyslaw Szpilman. Une table était réservée à elle et à sa mère.
Avant guerre, il y avait beaucoup d’écrivains, de poètes, de paroliers, des acteurs, des chanteurs, juifs. Lorsque les Allemands sont arrivés, une vie culturelle s’est mise en place dans le ghetto. Il y avait des cafés, des concerts, des programmations variées, où on parlait des misères du ghetto de façon drôle. Une fille, Miriam Eisenstadt avait une voix superbe, le rossignol du ghetto.
Le 22 juillet dès le premier jour de la déportation, les maisons sont entourées par des camions des Allemands et les gens emmenés à l’Umschlagplatz. Un milicien juif a vu Miriam, il a voulu la sauver, mais elle a pris par la main sa mère. Un milicien lui a dit de remonter dans le train et l’a tuée devant ses parents avec la crosse de son fusil. Un témoin oculaire a raconté à sa famille devant elle ce qui c’était passé.
Ce qui était très difficile c’était l’indifférence des Polonais. Il y a 6000 justes sur 36 millions de Polonais.
Le 18 janvier, deuxième vague de déportation. Ses parents ont décidé de s’installer dans le quartier aryen. Son père avait repéré une sortie d’égout.
Elle a voulu rentrer dans le ghetto pour la Pâque, pour voir sa grand mère.
Sa mère, restée du côté aryen, a voulu prendre du poison quand elle a compris que le 19 avril, il se passait quelque chose. Elle a attendu à la sortie des égouts. L’après midi des gens ont commencé à sortir, sales, à demi- asphyxiés, mais vivants. Il y avait un attroupement et des Polonais sont allés chercher des Allemands. « Jude ». Sa mère a vu des gens alignés contre un mur.
« Ne pleurez pas, lui a dit un Polonais, ma bonne dame, ne pleurez pas » Ce qui était atroce, c’est qu’on ne sentait aucune amitié. Les gens étaient indifférents.
Parmi les 6 millions de juifs, un million d’enfants. Combien de musiciens, de chercheurs ont disparu ? En 1940 deux petites filles ont été sortie du ghetto, pour une institution des enfants abandonnés dirigée par les bonnes soeurs, une de 15 ans, et une de onze mois. Les bonnes soeurs ont fait des faux papiers. 50 ans après, à un congrès à New York, où il y avait des médecins, des biologistes, ces deux petites filles se sont retrouvées. L’une envoyée par l’université de Louvain en Belgique, l’autre envoyée comme biologiste par l’Argentine.
Comment vous en êtes sortie ?
Le jour où elle est sortie avec sa grand mère, dans un abri où elles écoutaient la radio, il y avait le Kaddish à radio Londres pour les morts du ghetto de Varsovie.
Le quatrième jour, tous les juifs ont été sortis des abris par des Lettons, des Ukrainiens et amenés à l’Umschlagplatz. Sa grand mère est restée dans l’abri.
Elle sentait la mort sur l’ Umschlagplatz venant des wagons. Elle a pris la main de son père et les balles tombaient. Quelqu’un a été tué à côté d’eux. Elle a compris qu’un Allemand a dit de sortir le cadavre. Elle a pris le cadavre et avec son père, l’ a sorti du cordon où ils étaient parqués.
A côté, il y avait une autre place avec 50 personnes libérées par un Allemand qui avait besoin de main d’oeuvre. Ils se sont mis avec eux. Ils ont été conduits au petit ghetto.
Pour sortir du ghetto, il y avait un Allemand, un "bleu marine" polonais et un milicien juif à soudoyer. Son père leur a donné un billet. Elle est partie à 7 h du soir. La pièce où était sa mère, était à l’autre bout de Varsovie et le couvre feu à 8 heures. Elle faisait semblant de regarder les vitrines. Elle est arrivée à 8 heures moins cinq.
Son père a quitté le ghetto dans la voiture d’un chef d’entreprise allemand qui venait inspecter les ateliers. Le chauffeur avait ouvert le coffre...
Ils ont passé trois jours ensemble. Le 26 mai 1943, la mère blonde aux yeux bleus, est sortie pour acheter à manger, mais on l’attendait. Elle pense que sa mère a pris son poison.

Madame Goldberg avait 14 ans.
Elle ne s’intéressait pas aux mêmes choses que madame Den. Elle avait l’air Polonaise. Les écoles étaient fermées, (même pour les Polonais). Il y avait des cours privés. Elle voit un jour des enfants juifs qui se faisaient battre. Elle s’est arrêtée pour rouspéter et elle s’est aperçue qu’elle aussi était juive. Elle a sorti son brassard et elle est allée au cinéma.
Des gens du shtetel avec leur baluchon n’avaient rien. Ils étaient placés par les gens du Judenrat.
La révolte.
Ils faisaient des pièces cachées dans les appartements, des bunkers. Tout le monde avait des cachettes, sauf au petit ghetto qui n’était pas soumis aux mêmes règles. Des civils venus d’Allemagne ont ouvert des usines.
Elle ne croyait à rien. Elle s’est inscrite à l’usine Többen. Ils travaillaient pour l’armée. Elle avait un quart de pain, de la soupe. Quand elle a entendu parler des camps, elle a voulu travailler chez les Allemands. Elle a sauvé ainsi ses parents 8 mois de plus.
A partir de septembre, tout le monde a construit des pièces cachées.
Le 18 avril au soir, son oncle qui avait une usine de papeterie, a eu un coup de téléphone d’un Allemand. Tout le monde est descendu à la cave.
Beaucoup de juifs qui étaient du côté aryen et qui avaient des papiers, sont rentrés clandestinement au ghetto pour célébrer la Pâque. Ce qui fait qu’au lieu d’avoir 35 personnes dans le bunker, il y en avait 60. Ces bunkers étaient organisés pour vivre pendant six mois. On ne pouvait prévoir les flammes. Le soir, ils sortaient vers 10 h, mangeaient à 3 H et dès 4 h du matin les Allemands revenaient.
Puis la fumée est entrée dans les bunkers. C’était un enfer. Sa mère lui a jeté un chiffon mouillé sur la tête. Il y avait des duvets dans les rues.
Ses parents étaient désespérés, malades, le petit frère de 5 ans n’allait pas bien, elle avait tout sur la tête.
Il y avait des "Aktions" quand un train arrivait à Varsovie, il y avait des déportations. Le groupe de nuit était de jour dans les maisons. Or la sélection, c’était pendant le jour. Elle connaissait le directeur, un Volksdeutsche(Allemand de souche) car elle travaillait dans les bureaux. Le rouge, le jaune, le blanc, les cartons de travail changeaient toujours de couleur.
Quand il y a eu la sélection des Ukrainiens, le directeur lui a donné un coup de pied dans le derrière. A droite c’était Treblinka, à gauche, la vie.
La vie, c’était un présentiment. Une semaine après l’insurrection, il fallait absolument trouver une cachette. Elle savait que les gens étaient tués sur place. L’oncle et la cousine étaient sous les pierres de la maison tombée la veille, un bunker de 150 personnes. Sa mère voulait y aller, mais ils étaient 300 à cause de la Pâque. Elle n’a pas voulu y rentrer.
Elle a trouvé une maison brûlée la veille. Elle a vu des gens en train de faire une murette. Elle a été chercher sa mère. Le soir ils ouvraient des briques pour respirer. Il n’y avait plus rien à manger. Tout était chaud dans cette cave pleine de charbon.
Le 28 avril, les Allemands criaient : « La guerre est finie ». Ils sont sortis. Son père s’est sauvé. Les cours des immeubles étaient énormes. Elle a glissé sur ses fesses dans la cave et elle s’est endormie. Une voix l’a réveillée, sa mère. Elle a retrouvé son père. Le lendemain, ils se sont cachés. Mais où aller ?
Les Allemands sont arrivés et ils ont été conduit à l’Umschlagplatz. Elle s’est retrouvée à l’hôpital. Les trains n’étaient pas encore partis. Il y avait eu trois exécutions. Des corps sont tombés. Többens, l’Allemand est arrivé et l’a sortie. Puis elle a été poussée dans le wagon. Elle était à côté de la porte avec son père.
Quand ils sont arrivés à Lublin, ils étaient à demi morts, asphyxiés, malades. Dans un wagon entre deux baraques, il y avait un tas de cadavres avec du sang dégoulinant. Des gens mourant de soif se sont jeté dessus pour lécher. Dans ce camp, il y avait la sélection. Elle a retrouvé sa mère à demie morte et le petit tout bleu. Puis ils ont été à Maïdanek.
Sa mère ne croyait toujours pas à la mort. « On ne prend pas les gens en bonne santé et qui n’ont rien fait ».
Les cadavres étaient mis sur des troncs d’arbres et ils les brûlaient.

Henry Bulawko a entendu parler pour la première fois du ghetto de Varsovie par quelqu’un qui voulait faire un monument.
Quand il est allé à Varsovie, « 500 000 cadavres se trouvent sous ce sol », a dit un chauffeur de taxi. Il est allé au cimetière. Des SS savaient que des égouts sortaient par le cimetière.
Il est difficile d’imaginer que des hommes puissent tuer froidement.
Une amie est allée à Berlin pour faire un procès contre les SS. "Comment êtes-vous sortie du ghetto lui a t-on demandé ? - On a acheté le gardien à la porte. - Mais ce n’était pas légal !". C’était deux ou trois ans après la fin de la guerre.
Roosevelt à qui l’on demandait d’intervenir : « Ne dites pas à nos soldats qu’ils vont se faire tuer pour des juifs. » lui dit un conseiller. Peut être que la guerre expliquait tout.
En 1941, les Allemands ont droit à 2614 calories, les Polonais, 699 et les juifs, 184.

Nizza Thobi chante une chanson du Rossignol du ghetto : "Mon Dieu ! Pourquoi m’as-tu abandonné ?" :
http://www.nizza-thobi.com/bestellung.html

Le pianiste, film de Roman Polanski, 2002

C’est l’histoire de Wladyslaw Szpilman, un pianiste juif qui survit dans le ghetto,
" La vie dans le ghetto était d’autant plus atroce qu’elle gardait les apparences de la liberté", puis dans les ruines de Varsovie. Alors qu’il crève de faim, un officier allemand, le capitaine Wilm Hosenfeld, a aidé en 1944, Wladyslaw Szpilman dans les ruines de Varsovie. Il a aidé aussi des douzaines de Polonais, juifs et non-juifs. Il a permis à Wladyslaw Szpilman de poursuivre sa carrière de pianiste après la guerre. Wilm Hosenfeld en 1945, est prisonnier dans un camp soviétique où il meurt sept ans plus tard, de mauvais traitements et de maladie.
http://www.hosenfeld.de/pianist.htm
Wladyslaw Szpilman, Le pianiste, éditions Robert Laffont, avec un extrait du journal de Wilm Hosenfeld et une post- face de Wolf Biermann.
biographie : http://us.imdb.com/Name?Szpilman,+Wladyslaw

Fiche pédagogique, Le pianiste

par Elisabeth Brisson
Présentation du travail possible avec des élèves lors de la journée consacrée à l’histoire du Ghetto de Varsovie, le 23 avril 2003.
Précautions à prendre, ou plus encore impératifs à respecter lors de la présentation de ce film, Le Pianiste
. Il est indispensable de partir du fait que c’est une création artistique d’aujourd’hui, qui incite à une réflexion sur l’œuvre d’art, son existence et son effet.
Ce film consacré par différents jurys, a été conçu par un très grand cinéaste, la musique y détient une place essentielle.
. Il est nécessaire d’être conscient de notre responsabilité d’adulte enseignant
. pour que ce film ne soit pas perçu comme une illustration
. mais soit intégré profondément par nos élèves.
Il est primordial de donner des repères (cadre chronologique, contexte historique) et de rendre l’adolescent actif (en lui proposant de regarder particulièrement tel ou tel élément du film).
Enfin, il est conseillé de se formuler clairement les raisons pour lesquelles nous emmenons nos élèves voir ce film : essentiellement pour
. réfléchir à l’art, à l’histoire, à la condition humaine
. débattre sur le film, sur le livre, et sur la façon de faire ressentir les conditions de vie inhumaines
. rencontrer des témoins pour établir un lien entre le récit, la reconstitution proche de la fiction, et le vécu ou la réalité.
Pour tourner ce film Polanski a rencontré Szpilman avant sa mort (le 5 juillet 2000) et il a consulté les archives photographiques sur Varsovie et sur le Ghetto pour obtenir une reconstitution fidèle des lieux.
Il n’y a pas de méthode particulière (pas de recettes), mais il y a avant tout une attitude éthique
1. permettre la distanciation pour se rendre libre de toute fascination pour la violence ou de toute pitié
2. aider à comprendre le film dans son intrigue et sa structure
3. faire saisir ce que signifie «  devoir d’histoire » et surtout « devoir de création », ce qui est nécessaire pour ceux qui n’ont pas vécu l’événement.
1.Permettre la distanciation
·situer dans l’histoire
·évoquer l’origine du film (de Polanski, après la lecture du livre, tourné par une équipe polonaise en 2001, etc.)
·lien avec le livre (livret très proche de texte)
·le choix de Polanski (son histoire, par un détour et par la rencontre avec le récit d’un autre artiste)
Roman Polanski est lui-même un survivant du ghetto de Cracovie : ses parents, polonais installés en France, avaient choisi de retourner en Pologne en 1936 (sa mère est morte en déportation en 1941).
·fournir les outils d’analyse des images mobiles (plans, mouvements de la caméra, rythme, montage) – voir Le vocabulaire du cinéma, Nathan université 128, 2002, par Marie-Thérèse Journot.
2.Aider à comprendre le film
·les différents moments de l’intrigue
·les personnages et leurs relations
·les situations tragiques, drôles, banales
3.Développer le devoir de création
·comment a procédé Polanski pour obtenir cet effet de vérité : choisir une scène comme celle de l’Umschlagplatz et analyser la façon dont il a procédé
·les traits constants de ses films (solitude, monstrueux, enfermement)
·les références de Polanski et son hommage à Korczak et à Wajda, entre autres
·s’interroger sur la place de la musique, sur le rôle et l’effet de la musique de Chopin :
Le Nocturne en ut dièse mineur, op. 27, n°1, que joue " le Pianiste " a été composé par Chopin en 1834-1835 .
quand le pianiste joue sait que personne ne l’écoute, mais il est « un homme en qui la musique est vivante », en particulier celle de Chopin, ce compositeur qui « n’asservit personne par son discours » et qui touche d’une manière directe (comme l’écrit André Boucourechliev dans Regard sur Chopin, Fayard, 1996) ; il connote une « musique polonaise » d’un exilé, qui a ressenti très douloureusement les malheurs d’un peuple opprimé et effacé de la carte politique et culturelle de l’Europe et du monde
·présenter Theresienstadt : malgré le dénuement et la terreur, la musique, le théâtre, l’école clandestine ont maintenu la dignité humaine et donné une raison de vivre, de créer et de survivre au moins dans les mémoires
(cf. Musique à Terezin, 1941-1945 de Joza Karas, Gallimard,
et Le masque de la barbarie, Le ghetto de Teresienstadt 1941-1945, ouvrage dirigé par Sabine Zeitoun, directeur du Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation, Lyon, 1998 – 14 avenue Berthelot, 69007, Tél : 04 78 72 23 11)
Comparer avec d’autres œuvres :
Primo Levi, Si c’est un homme
Ruth Klüger, Refus de témoigner, (en allemand, Weiter leben, continuer à vivre ), Viviane Hamy 1997, 320 p. (en livre de poche 2003)
Stanislas Tomkiewicz, L’adolescence volée, livre de poche Pluriel, 2002
KORCZAK Janusz, Journal du ghetto, 10/18, 1998
Elisabeth Brisson

Mardi 16 oct 2012, projection d’extraits du "Pianiste" en présence de Roman Polanski, un enfant à Cracovie, à 19h au Mémorial de la Shoah

Chronologie du ghetto de Varsovie

1939

- 1 er septembre : Les troupes allemandes pénètrent en Pologne.
- 27 septembre : Capitulation de Varsovie.
- 4 octobre : Création du Conseil juif, Judenrat,
dirigé par Adam Czerniakow, pour faire régner l’ordre.
- 8 novembre : Hans Franck est nommé Gouverneur Général de Pologne.
- 23 novembre : Le port d’un brassard avec une étoile de David bleue, devient obligatoire pour les Juifs dans tout le territoire du Gouvernement Général de Pologne. Les interdictions concernant les Juifs se multiplient.

1940

- 1er mai : Offensive allemande à l’ouest.
- Juin : Le Judenrat est sous les ordres des Allemands.
- Septembre : Les chrétiens qui habitent l’emplacement du futur ghetto doivent partir.
- 16 octobre : création du « secteur d’isolement sanitaire » au centre de Varsovie.
- 15 novembre : Fermeture du « quartier d’habitation juif »
avec des murs de 3 m de haut et 1 m de barbelés.

1941

- Le Judenrat recense 380 000 juifs dans le ghetto de Varsovie.
- 1er avril : 72 000 Juifs de Pologne sont déportés dans le ghetto.
- Mai : 450 000 Juifs s’entassent dans le grand et le petit ghetto dont la superficie a été restreinte.
- 22 juin : L’Allemagne attaque l’Union soviétique.
- Septembre : Diminution des rations alimentaires ; du courrier de l’étranger ; Des cadavres jonchent les rues.
- Octobre : Peine de mort pour toute sortie du ghetto sans laissez-passer.
- 16 décembre : Hans Franck déclare qu’il faut se débarrasser de 250 000 Juifs.
- fin décembre : Les cantines gratuites du ghetto distribuent chaque jour 100 000 repas.

1942

- 14 avril : On apprend l’extermination du ghetto de Lublin.
- 17 - 18 avril : exécution de personnes suspectes de participation à la presse clandestine.
- 22 juillet : Début de la « Grande Action » dans le ghetto de Varsovie.
Première vague de déportation avec la participation de la police juive, la Grande Déportation vers Treblinka.
Les Allemands annoncent le transfert vers l’est de population.
Le Judenrat publie un décret de déportation concernant 380 000 personnes. 6000 personnes par jour doivent se rassembler au lieu d’embarquement. Adam Czerniakow se suicide le 23. « Ils exigent de moi que je tue de mes mains les enfants de mon peuple. Il ne me reste qu’à mourir ».
Le témoignage de Zygmunt Frydrych (Zalman Friedrich ) sur les procédés d’extermination pratiqués à Treblinka n’est pas cru.
- 5 août 1942 : déportation de Janusz Korczak et des enfants.
- 12 septembre : 350 000 juifs ont été déportés à Treblinka.
Il ne reste qu’environ 60 000 Juifs dans le ghetto.
- 23 septembre : Les SS et la SD prennent en main l’administration des affaires juives à Varsovie.
- 20 octobre : Un comité de coordination (KK) constitue l’Organisation juive de combat , O. J. C. , Zydowska Organizacja Bojowa ou ŻOB avec Mordekhaï Anielewicz, Marek Edelman.
- 2 décembre : rassemblement des résistants du ghetto, (OJC) et l’Union juive militaire, (ZZW).

1943

- 9 janvier : visite d’Himmler qui donne ordre d’exterminer les habitants du ghetto.
- 18 janvier : Deuxième vague de déportation. Face à une résistance armée, les SS allemands et autrichiens doivent interrompre la « deuxième action ».
- 19 avril : Insurrection du ghetto. Des forces allemandes, polonaises, ukrainiennes, lettones et lituaniennes, encerclent le ghetto et deux détachements de soldats entrent dans le ghetto.
La résistance armée s’organise.
- Le 23 avril : le ghetto est bouclé. Au bout de quelques jours de combat, le général SS Jürgen Stroop ordonne de mettre le feu au ghetto, enfume les égoûts, détruit les usines.
Les Waffen SS, la Wehrmacht, et leurs auxiliaires prennent maison après maison.
- 8 mai : Mordekhaï Anielewicz se suicide, comme la plupart des insurgés survivants.
- 10 mai : Marek Edelman et quelques autres s’enfuient par les égouts.
- 12 mai : Szmul Zygielbojm se suicide à Londres pour protester contre la conspiration du silence des gouvernements alliés.
- 16 mai : « 180 juifs, bandits et êtres inférieurs ont été anéantis.
Le ci-devant quartier juif de Varsovie n’existe plus. » écrit le SS Jürgen Stroop.
19 mai fin du ghetto

- 15 août : Un camp est constitué à Varsovie pour nettoyer les ruines de l’ancien ghetto.
Le ghetto est rasé, déblayé.

1944

1er août : insurrection générale de Varsovie-2 octobre Écrasement de l’insurrection.
médiagraphie :
http://www.warsawuprising.com/res.htm

1945

27 janvier : Libération d’Auschwitz par l’armée rouge

Médiagraphie

Bibliographie
BERG Mary, Warsaw Ghetto. A Diary by Mary Berg, Shneiderman, S.L. Ed. New York, NY : L.B. Fisher, 1945
BORWICZ Michel, L’insurrection du ghetto de Varsovie, coll. Archives, Julliard, 1966
CAIN Larissa, Ghettos en révolte, Pologne 1943, éd. Autrement, 2003
CZERNIAKOW Adam, Carnets du ghetto de Varsovie. 6 septembre 1939-23 juillet 1942, éd. La Découverte, 2003 (Im Warschauer Getto. Das Tagebuch des Adam Czerniaków, München, C.H. Beck, 1986 )
DAWIDOWICZ Lucy S. : La Guerre contre les Juifs - 1933-1945 (traduit de l’Américain par Gilles Garnet) Hachette, 1977 (1975 édition américaine)
DAWIDOWICZ, Lucy S., Visualizing the Warsaw Ghetto. Nazi Images of the Jews Refiltred by the BBC. A Critical Review of the BBC Film ’The Warsaw Ghetto’. (Typewritten Manuscript), Yeshiva University, Februar 1978
EDELMAN Marek, KRALL Hanna, Mémoires du ghetto de Varsovie, Paris, Le Scribe, 1993, rééd. Éditions Liana Levi, 2002, 192 p.
« Si Israël a été créé, c’est grâce à un accord passé entre la Grande-Bretagne, les États-Unis et l’URSS. Pas pour expier les 6 millions de Juifs assassinés en Europe, mais pour se partager des comptoirs au Moyen-Orient. »
http://www.courrierinternational.com/article/2006/04/13/l-insurge-perpetuel
GUTMAN Israel, The Jews of Warsaw 1939-1943 : Ghetto, Underground, Revolt, Brighton, 1982
HEYDECKER Joe J., Das Warschauer getto, dtv, 1983, préface de Heinrich Böll
KARSKI Jan, Mon témoignage devant le monde - Histoire d’un État clandestin, Troisième édition française de "Story of a Secret State", 1944 ; préface et annotations de Céline Gervais-Francelle, R. Laffont, 2010
KASSOV Samuel D., Qui écrira notre histoire ? Les archives secrètes du ghetto de Varsovie, "Who Will Write Our History ? "
KLEMP Stefan, Vernichtung. Die deutsche Ordnungspolizei und der Judenmord im Warschauer Ghetto 1940 bis 1943, Prospero, Münster, 2015, 288 p.
KOTEK Joël, L’insurrection du ghetto de Varsovie, textes réunis autour de Raul Hilberg, éd. Complexe, 1994
RINGELBLUM Emanuel, The Warsaw Ghetto and the Oyneg Shabes Archive traduit de l’américain par Pierre-Emmanuel Dauzat, Grasset, 2011, 608 p.
Oyneg Shabes est le nom du groupe d’archivistes dirigés par Emanuel Ringelblum, qui ont enterré les archives dans trois bidons de lait
RINGELBLUM Emanuel, Chroniques du ghetto de Varsovie, Laffont, 1959, rééd. Petite bibliothèque Payot, 1995
ROUSSEAU Frédéric, L’enfant juif de Varsovie. Histoire d’une photographie, Seuil, 2009, 272 p. (Richard RASKIN, A Child at Gunpoint : A Case Study in the Life of a Photo, Aarhus University Press, 2004)
SZPILMAN Wladyslaw, Le Pianiste. L’extraordinaire destin d’un musicien juif dans le Ghetto de Varsovie, 1939-1945, Editions Robert Laffont, 2001
URIS Léon, Mila 18, (Roman inspiré par les faits réels), Robert Laffont, 1961
REICH-RANICKI Marcel, Mein Leben, Stuttgart 1999
ROTH Markus, LÖW Andrea, Das Warschauer Getto : Alltag und Widerstand im Angesicht der Vernichtung, Beck, 2013, 240 p.

Sites web
Des photos du ghetto
http://www.g-ligue.com/dgmi/ghettovarsovie.htm
Sur le ghetto, la révolte....
http://www.yad-vashem.org.il/exhibitions/temporary_exhibitions/childsplay/lexicon/warsaw_ghetto_uprising.html
Les diverses organisations :
http://warsawghetto.epixtech.co.uk/HistV.htm
D Natanson, Le ghetto de Varsovie :
http://perso.wanadoo.fr/d-d.natanson/ghetto_varsovie.htm

Films
Requiem pour 500 000 , Jerzy Bossak et Waclaw Kazmierczak, documentaire de 1963
Le pianiste de Roman Polanski
Quand les nazis filmaient le ghetto , Allemagne, 2009, 86mn, DR,réalisateur : Yael Hersonski. "À partir du film inachevé "Das Ghetto", tourné par les nazis à Varsovie, Yael Hersonski s’interroge sur l’apport des images au travail de mémoire."
"La réalisatrice israélienne Yael Hersonski croise ces archives brutes avec les témoignages récents de cinq survivants, des extraits des journaux intimes des victimes et un entretien avec Willy Wist, l’un des cameramen "metteurs en scène" d’alors."
http://web.archive.org/web/20100818005030/http://www.afilmunfinished.com/
The Unfinished Film. Quand les nazis filmaient les ghettos, Geheimsache Ghettofilm, film de propagande, montage de Yael Hersonski, 2010, 63 min, "Das Warschauer Ghetto"
transcription des divers fragments de films :
http://www.bpb.de/geschichte/nationalsozialismus/geheimsache-ghettofilm/141442/hintergruende
Découpage du film, NS-Propagadafilm "Asien in Mitteleuropa" :
http://www.cine-holocaust.de/cgi-bin/gdq?dfw00fbw000817.gd
Etude sur le film :
http://www.bpb.de/geschichte/nationalsozialismus/geheimsache-ghettofilm/156552/rainer-rother-zu-geheimsache-ghettofilm
Chronique du Soulèvement du Ghetto de Varsovie (Chronik des Aufstands im Warschauer Ghetto), 1994, d’après Marek Edelmann, Marek Edelman, film réalisé par Jolanta Dylewska et Jolanta Dydylewska.
Rudashevski Yitskhok, Entre les murs du ghetto de Wilno 1941-1943, journal
traduit du yiddish par Batia Baum, édition l’Antilope, 2016 :
"Aujourd’hui j’ai quinze ans et je vis confiant en l’avenir.Je vois devant moi du soleil, du soleil, du soleil, du soleil."
http://www.zeit.de/wissen/geschichte/2013-04/warschauer-ghetto-aufstand-widerstand
The ghetto influenced daily life of Warsaw Jews, irreversibly changing the city fabric. http://warsze.polin.pl/en/
Texte complémentaire d’Igor Reitzman : "comme des moutons"

Ne pas confondre le soulèvement du ghetto en 1943 avec l’insurrection de Varsovie d’août à octobre 1944
SLEDZIEWSKI Elisabeth G., Varsovie 44 : récit d’insurrection, Août-octobre 1944, éditions Autrement, Paris, 2004, 205 p.
Témoignages sur les ghettos :
https://www.cercleshoah.org/spip.php?article7

Krystyna Budnicka, la dernière survivante juive polonaise, raconte les 8 mois qu’elle a passés dans un bunker souterrain où elle s’est cachée "comme un rat" entre 1942 et 1943.

[1Conseil juif, instrument de l’autorité allemande, créée par celle-ci et constamment soumise à sa supervision. Les membres sont nommés par les Allemands. Dès que les Allemands occupaient une localité ils cherchaient à constituer un organe local chargé d’appliquer leurs ordres. Ceux qui étaient désignés étaient obligés d’accepter. Souvent ils étaient l’objet de menaces.

[280e anniversaire de la tragédie en Volhynie et en Galicie orientale. Entre 1943 et 1945, l’UPA (Armée insurrectionnelle ukrainienne) a mené une opération de nettoyage ethnique dans les régions à majorité ukrainienne de Volhynie et de Galicie qui faisaient partie de l’État polonais d’avant-guerre, entraînant la mort de 50 000 à 100 000 Polonais, dont des femmes et des enfants.