Concours national de la résistance et de la déportation 2026
« La fin de la Shoah et de l’univers concentrationnaire nazi – survivre, témoigner, juger – 1944-1948 »
Les mots du sujet
Une fois de plus, le thème proposé est très vaste et ambigu : les élèves et les enseignants devront choisir un angle de recherche plus restreint et de préférence local.
Le sujet ne donne pas de bornes géographiques : doit-on tenter de balayer toute l’Europe ? Ou se concentrer sur l’Allemagne nazie ? Comme dit plus haut, choisir une approche française, régionale voire très locale semble plus facile.
Les dates proposées sont étonnantes :
en 1944 [1] Chronologie du nazisme à la Shoah ; les procès il y a encore des déportations, des morts par milliers dans les camps nazis et durant les marches de la mort. Auschwitz n’a été libéré que début 1945, les déportés survivants des camps de l’Europe centrale et de l’Est ne sont rentrés en France qu’à la fin du printemps-début de l’été 1945 pour les premiers. Le camp sur le territoire français du Struthof- Struthof, camp de concentration nazi en France n’a été ouvert (vide) que fin 1944. Il est préférable de parler de l’ « ouverture » des camps plutôt que de leur « libération » car la plupart des déportés survivants disent n’avoir jamais été « libérés » psychologiquement bien sûr ni même dans leurs corps du fait des séquelles de leur enfermement.
Quant à 1948, bien des événements peuvent être pris en compte, apparaissant comme des conséquences des crimes, génocides pratiqués par les nazis 1948 — Wikipédia (création de l’état d’Israël, déclaration universelle des droits de l’homme, convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, fin du procès des Einsatzgruppen, voire blocus de Berlin …), mais semblent difficiles à aborder pour des élèves dans le cadre de ce concours.
Le mot Shoah a été étudié de façon approfondie dans les divers articles de notre site : définitions : définitions : Génocide, Holocauste, Shoah. Claire Zalc pour la Revue Agone.
Il semble plus pertinent de réfléchir à partir de la proposition suivante du sujet : « fin de l’univers concentrationnaire nazi ». Il faut bien sûr tenter de définir cette expression : KL : Nikolaus Wachsmann - KL : une histoire des camps de concentration nazis, Nikolaus Wachsmann
Le sujet, parlant de l’ « univers concentrationnaire nazi », prend en compte toutes les causes des déportations Etudier la déportation de répression et la déportation de persécution (et donc pas seulement la déportation des juifs), toutes les formes de déshumanisation, de condamnations à mort à courte ou moyenne échéances, tous ceux qui ont pu toutefois survivre, revenir, raconter. Notre site propose de multiples analyses et témoignages sur ce système concentrationnaire et sur les derniers mois des camps : : Résultats de la recherche - système concentrationnaire nazi
Le sujet propose ensuite trois mots-clés particulièrement riches en thèmes sous-jacents :
1. Survivre : survivre dans les camps est détaillé dans l’analyse du système concentrationnaire. Survivre au retour des camps fut vécu de façon très différente selon les déporté.es et le recours à des témoignages est indispensable mais ne permet pas de faire une « typologie ». CNRD 2015 La libération des camps nazis, le retour des déportés ; V. Des décennies après, quels bilans ? CNRD 2015
2. Témoigner : contrairement à ce que l’on entend souvent, beaucoup de personnes revenues des camps nazis ont témoigné à leur retour. Mais les auditeurs n’avaient le plus souvent pas envie d’entendre, pas surtout la possibilité de comprendre « l’impensable » et l’ambiance générale était plutôt favorable à « tourner la page », construire un avenir enthousiasmant. Le Cercle a publié de nombreux récits sur ces retour [2], la vie « d’après » La vie après : La vie après Les répercussions de la déportation d’un parent sur son enfant né à son retour ne font pas partie du cadre chronologique du sujet mais c’est un point essentiel de cet « après ».
3. Juger : il faut distinguer plusieurs formes de jugements. Il y a eu une épuration sauvage, la vindicte populaire « jugeant », exécutant brutalement telle ou telle personne considérée comme responsable (y compris pour les surveillants dans les camps nazis dont certains ont été tués par les prisonniers)
Il y eut aussi de nombreux procès suivant les règles, procédures démocratiques c’est-à-dire menés par des magistrats et donnant la parole à des avocats. La justice internationale a permis de distinguer les crimes « ordinaires », les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité. Crimes contre l’humanité, conférence de Maitre Michel Zaoui, ; Le crime contre l’humanité, Pierre Truche
Ces procès font appel à des témoins : il faut réfléchir à ce qu’est témoigner de suite après guerre, et témoigner des décennies plus tard Le témoignage, le rôle du témoin ; Robert Waitz Robert Waitz, résistant, déporté, témoin au procès de Nuremberg, par Georges Hauptmann
Certains de ces procès ayant eu un retentissement international sont postérieurs à 1948. Les élèves doivent donc bien cibler leurs choix s’ils veulent approfondir cette partie de sujet. Pour ce thème il y a aussi de nombreux articles sur notre site. Les procès contre les criminels de guerre nazis
Si ce sujet ouvre de multiples possibilités de réflexion, approfondissements, il ne doit pas conduire les élèves à se perdre dans une volonté d’exhaustivité. Il leur faut choisir un « sous-sujet » plus restreint mais accessible pour eux en utilisant bien sûr les ressources en ligne mais surtout les archives locales – municipales ou départementales. On rappelle qu’il ne faut pas oublier la presse écrite qui régionalement offre de nombreux exemples, témoignages, récits, comptes-rendus de faits d’époque et dont les anciens numéros sont souvent accessibles.
Le Cercle d’étude a publié de nombreux petits cahiers Petits Cahiers-Brochures, publications du Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah qui sont à la disposition des élèves. Beaucoup peuvent apporter des informations concernant directement le sujet : ainsi celui sur les Marches de la mort, le convoi 76, Marie-Claude Vaillant-Couturier, Adelaïde Hautval, Charlotte Delbo, la conférence sur crimes de guerre, crimes contre l’humanité etc.
Cet article ne propose pas de bibliographie autre que celles proposées par le Cercle : d’autres associations et institutions fourniront de longues listes.
Martine Giboureau