Dunkelblum, Eva Menasse
En Autriche, dans le Burgenland, à la frontière avec la Hongrie, un squelette est découvert sur le territoire du village nommé Dunkelblum (fleur foncée). Les habitants deviennent fébriles.
Un homme, arrivé avec l’autocar, parcourt des yeux le paysage : du vert, du jaune, du bleu, une boursouflure dans le sol appelée « la Montagne » par plaisanterie, une tour blanche, reste d’un château, des vestiges formant un muret. Ce personnage mystérieux, venu d’Amérique, descend à l’hôtel Tüffer, Art Nouveau, repris par l’ancienne employée après le départ des propriétaires en 1938. Son client lui fait peur. Est-il quelqu’un de la famille Tüffer ?
Des jeunes débarquent pour remettre en état les trois cimetières juifs envahis par les ronces. Ce n’est pas avec l’argent des contribuables, affirme le maire par intérim. Il a un problème avec une société privée d’exploitation de l’eau.
Une grange a brûlé. Un enfant du pays est de retour, après le décès inexpliqué de sa mère qui avait reçu une carte de menaces. Elle s’intéressait à l’histoire locale avec le directeur d’une agence de voyage, et une jeune fille qui enquêtait sur l’histoire du village, a disparu. Quels secrets cache ce village ? Le directeur de l’agence voudrait créer un musée d’« Arts et traditions populaires », la jeune fille, un musée de la frontière. L’étranger recherche deux femmes qui l’ont sauvé autrefois en l’abritant dans une grange. Il cherche des tombes. Celle de son père.
Des histoires anciennes resurgissent. Un homme a été tué à la frontière avec la Hongrie. Un cycliste a été retrouvé mort dans un champ, assassiné et brûlé avec son chien. Les tombes du cimetière juif ont été profanées avec de la peinture blanche. Un jeune, le coupable, a reçu un coup de couteau dans la cuisse.
Des photographes, reporters, TV arrivent. Les gens sont derrière leurs volets.
Le bourg est divisé comme autrefois avec les partisans des nazis et les autres, les juifs. En 1938, des listes de noms des familles avec leur adresse, a été placardée sur les murs de l’Hôtel de ville, avec ordre de quitter les lieux. « Dunkelblum, Judenfrei ». Le médecin juif a dû partir laissant son cabinet au nouveau qui n’y connaît rien. L’épicier est le seul juif revenu avec sa mère après la guerre.
Le représentant du Gauleiter local, a dirigé un camp de travailleurs forcés de l’Est. Des juifs misérables, des Hongrois de Budapest, devaient construire des fortifications pour retenir l’Armée rouge avec des bunkers et des postes de tir. 30 000 à 40 000 hommes creusaient des fossés. Extermination par le travail.
1989. Des réfugiés arrivent par la frontière de la Hongrie en Autriche, puis par Prague. Le maire est désemparé, il veut bien les accueillir. La droite hurle. Pourtant, ce sont des citoyens allemands de RDA, République démocratique allemande, pas des Autrichiens.
Les langues se délient.
Un événement mystérieux s’est déroulé en mars 1945 au château, au cours d’une fête donnée par la comtesse. Du personnel a vu des armes, le SS, amant de la comtesse.
200 juifs ont été assassinés au cours de cette fête. Des bruits, des gémissements, ont été perçus. On n’a jamais retrouvé leurs corps. Qui est responsable ? Quel rôle a joué la comtesse ? Le SS dit-elle, c’est lui qui a mis le feu au château.
Il a suffi de deux chars russes et des grosses poutres pour former un pont provisoire, et réduire à néant ce mur, le rempart sud-est, « infranchissable ».
Le SS a disparu avec l’aide de la comtesse. Le nazi sadique, son bras droit, homme à tout faire, après s’être caché, a réussi à se faire nommer chef de la police locale.
Des Hitlerjungen lors de leur procès, reconnaissent avoir accompagné les ouvriers du mur dans la forêt, qui ont été pris en main par des SS. Ils ont entendu des coups de feu. Leurs uniformes étaient pleins de boue et de sang.
Des habitants cherchent à se faire passer pour des victimes, dénonçant les horreurs commises par les Russes, voleurs de montres et violeurs de filles. L’Autriche se dit victime à cause de l’Anschluss.
Les témoins gênants ont été assassinés. Silence.
Le nouveau docteur a une grosse voix. Stupeur. Il est noir.
De très nombreux personnages, heureusement que l’autrice a prévu une liste.
MENASSE Eva, Les Silences de Dunkelblum, Stock, 2024.
MENASSE Eva, Dunkelblum, Roman, Kiepenheuer & Witsch & Co. KG, Cologne/Germany, 2021
Que sont devenus les corps des victimes ?
RE.F.U.G.I.U.S. « REchnitzer Flüchtlings- Und GedenkInitiative Und Stiftung »
https://www.refugius.at/index.php/de/zuschauflerkommando
NM
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