Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah

Je suis une étoile, Inge Auerbacher au Bundestag à Berlin

Ich bin ein Stern
lundi 31 janvier 2022

Le 27 janvier journée de commémoration pour les victimes du national-socialisme. Inge Auerbacher a pris la parole au Bundestag à Berlin. Elle a été déportée à 7 ans avec ses parents au camp de Theresienstadt.

Inge Auerbacher, Ich bin ein Stern, Beltz, 1991 ; Je suis une étoile, éd. Virgule 1989.

Bundestag, discours d’Inge Auerbacher

Pour le 77e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz, Inge Auerbacher, 87 ans, a prononcé jeudi 27 janvier 2022, au Bundestag le discours commémoratif.
https://www.bundestag.de/dokumente/textarchiv/2022/kw04-gedenkstunde-rede-auerbacher-879226

Inge Auerbacher née en 1934 à Kippenheim, en Bade, a grandi dans le „Dörfle“ Jebenhausen, puis à Göppingen en Pays souabe. Son père, Berthold Auerbacher était marchand de textile. Grièvement blessé, il était un mutilé de la guerre 14-18 et avait la Croix de fer. Sa mère, Regina née Lauchheimer, était souabe, sa grand-mère, venait d’une nombreuse famille de 14 enfants, dont quatre frères ont combattu pendant la Première Guerre mondiale. Deux sont morts pour la patrie allemande.

Les 9 et 10 novembre 1938, la nuit des pogroms, de violentes émeutes ont eu lieu en Allemagne. A Kippenheim, c’était le 10, elle avait 4 ans. Les nazis lançaient des pierres sur les fenêtres. La synagogue, trop près des maisons, n’a pas été incendiée.
Tous les hommes de plus de 16 ans ont été envoyés dans des camps de concentration.
Son père et son grand père ont été conduits à Dachau, baraque 16, puis ils ont été renvoyés. Ils ont déménagé chez les grands-parents à Jebenhausen. En 1939, c’était trop tard pour émigrer. Le grand père est mort d’une maladie cardiaque.

Ne pouvant aller à l’école publique, elle avait un long trajet à faire jusqu’à l’unique école juive de la région à Stuttgart. Ses parents étaient travailleurs forcés dans une usine à Göppingen. Elle continuait à jouer avec les enfants et des paysans aidaient ses parents.

Je suis une étoile, Inge Auerbacher

Mais à partir du 1er septembre 1941, tous les juifs de plus de six ans ont dû porter l’étoile jaune. Des enfants se moquaient d’elle. Une femme a laissé à côté d’elle un sac de petits pains dans le train qui la menait à l’école. Inge Auerbacher n’a fait qu’une petite partie de la première classe à l’école juive qui a été fermée.

Les déportations vers l’Est ont commencé fin 1941.
Sa grand-mère a été assassinée dans la forêt de Bikernieki, près de Riga en Lettonie. Ils ont dû quitter la maison de Jebenhausen pour aller dans une "maison juive" à Göppingen. En août 1942, des juifs avons été rassemblés dans le gymnase de l’école Schiller à Göppingen. Puis à Stuttgart, dans le camp de rassemblement de Killesberg. Un garde lui a rendu sa poupée Marlène qui ne contenait rien d’interdit. Le 22 août 1942, avec des juifs du Wurtemberg, ils ont été déportés vers le camp de concentration de Theresienstadt en Tchécoslovaquie. Elle avait 7ans.

Forteresse de Theresienstadt, photo Daniel Nicolle

Après deux jours de transport, elle est arrivée à gare de Bauschowitz. Des gardes hurlaient, donnaient des coups de fouet. Ils ont marché pendant 3 km. Elle tenait sa poupée dans ses bras. Parqués dans une grande caserne au dernier étage, le camp était entouré par de hauts murs, avec des clôtures en bois et des fils barbelés.
Les nazis ont camouflé le camp en ghetto modèle à des fins de propagande pour la Croix-Rouge internationale en 1944.
Theresienstadt - Terezin, une colonie modèle

Les détenus venaient de toute l’Europe, il y avait beaucoup de mutilés. Elle a eu la chance de ne pas être séparée de ses parents, étant dans la partie des mutilés. Ils dormaient sur des paillasses dans des châlits, sans hygiène. Le typhus était un grand danger au milieu des rats, souris, puces, poux et punaises. Les enfants cherchaient à manger dans les ordures. "Les mots les plus importants pour nous étaient : Pain, pomme de terre et soupe... Notre terrain de jeu était un tas d’ordures qui sentait le pourri. "

Un jour, lors d’une sélection des hommes, Ruth sa meilleure amie et ses parents, disparaissent. Ils ont été déportés à Auschwitz. Ruth a déposé des roses blanches au 84 de la Wallstraße, dans le centre de Berlin, pour Ruth Nelly Abraham, Herta Abraham et Richard Abraham.

Ruth, l’amie d’Inge

https://www.juedische-allgemeine.de/unsere-woche/meine-beste-freundin-ruth/

Ils ont été libérés par les Soviétiques le 8-9 mai 1945.
" Sur 140.000 personnes déportées à Theresienstadt, 33.000 y sont mortes et 88.000 ont été assassinées à Auschwitz ou dans d’autres camps.
Nous étions 15.000 enfants et seuls quelques-uns d’entre eux sont restés en vie ; parmi eux, par miracle, il y a moi." Sans doute la seule enfant revenue de Stuttgart.
« Une île, une forteresse », Terezín, Hélène Gaudy
La famille est d’abord accueillie dans un camp de réfugiés à Stuttgart, puis retourne à Göppingen. Ils ont émigré en mai 1946 à New York.
Suite à la malnutrition et à la saleté, Inge a été très malade, elle avait attrapé la tuberculose, elle a passé 4 ans au lit. Elle a travaillé pendant 38 ans comme chimiste dans la recherche médicale et le travail clinique.
"Ich schließe mit meinem Herzenswunsch : Menschenhass ist etwas Schreckliches. Wir sind alle als Brüder und Schwestern geboren. Mein innigster Wunsch ist die Versöhnung aller Menschen."
(Je termine par mon vœu le plus cher : la haine des hommes est une chose terrible. Nous sommes nés tous frères et sœurs. Mon vœu le plus cher est la réconciliation de tous les hommes.)

"Je parle souabe" dit-elle, elle prononce son discours avec l’accent souabe.
le discours

Inge Auerbach témoigne, elle est très lue par les élèves en Allemagne. Elle répond à leur courrier.
L’enseignement de l’histoire de la Shoah en Allemagne

L’étoile jaune, un signe d’infamie :
http://clioweb.canalblog.com/archives/2022/01/28/39324032.html

Discours de Mickey Levy, Präsident der israelischen Knesset
https://www.bundestag.de/dokumente/textarchiv/2022/kw04-gedenkstunde-rede-levy-879316

NM