Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah

Les Justes allemands ; Fritz Schellhorn, Czernowitz, Bucovine

un diplomate allemand en Roumanie, Juste
lundi 8 février 2021

Fritz Schellhorn, un Souabe catholique, a sauvé 20 000 juifs Roumains de la déportation.

Des Justes allemands

Beaucoup de sauveteurs sont à Berlin.

Aide aux juifs persécutés sous le nazisme à Berlin Otto Weidt, le groupe "oncle Emil" et Ruth Andreas-Friedrich, Luise Meier et Josef Höfler, Gräfin von Maltzan, Harald Poelchau, pasteur à la prison de Tegel
La robe de Hannah. Berlin 1904–2014, Pascale Hugues
Hanni Lévy. Les invisibles - Nous voulons vivre Viktoria Kolzer, Elfriede et Grete Most deviennent Justes en 1978
Sauvetage de juifs par la paroisse suédoise Victoria, à Wilmersdorf, Berlin

Carte des lieux de sauvetage de Juifs dans les frontières de l’Allemagne actuelle
Yad Vashem-Zeit

Une liste incomplète.
Stille Helden im Dritten Reich, des héros discrets sous le Troisième Reich
http://www.gedenkstaette-stille-helden.de/
https://de.wikipedia.org/wiki/Kategorie:Gerechter_unter_den_V%C3%B6lkern_(Deutschland)
Else Blochwitz (1899-1992), Juste de Berlin

Fritz Gebhard Schellhorn, le sauveteur de Czernowitz

Fritz Gebhard Schellhorn, né en septembre 1888 à Rottweil, mort en mai 1982 à Rottenburg [1], a étudié la médecine à Tübingen, Berlin, Munich et Lausanne. Traumatisé en tant que médecin pendant la guerre 14-18, il reprend ses études et devient docteur en Sciences politiques.

Il est affecté au service des affaires étrangères de la République de Weimar à Bruxelles, Reykjavík, Vienne, de 1931 à 1933 il est conseiller à la légation à Paris.
De retour à Berlin en juillet 1933 après l’arrivée au pouvoir de Hitler, il entre au NSDAP en 1933. Il appartient au SS-Reitersturm (section de cavaliers). Mais il se détourne du nazisme après la "Nuit des longs couteaux" de 1934 (la répression contre Röhm et ses partisans et des conservateurs de ses connaissances).

  • Consul en Roumanie
    Un diplomate allemand, consul en Roumanie de 1934 à 1944.

    Fritz Gebhard Schellhorn est consul à Czernowitz, la capitale de la Bucovine, puis à Iași, et de nouveau à Czernowitz et enfin au département consulaire de la légation à Bucarest.
  • 23 août 1939 : Pacte germano-soviétique.
    La Roumanie est amputée de la Bessarabie et de la Transnistrie. Les Soviétiques occupent la Bucovine du Nord.
    En Bucovine, la population est composée de Roumains, Polonais, Ukrainiens, Autrichiens, Allemands en majorité catholique et de Juifs.
    Schellhorn décrit ses efforts pour aider non seulement les "Volksdeutsche"de la Bucovine mais aussi 14 000 Roumains se faisant passer pour des Allemands, au moment de l’occupation soviétique, à se réinstaller, dans les territoires polonais occupés.
    Roumanie 1941-44
    wikipedia
  • Ion Antonescu instaure un régime de type fasciste et pourchasse les Juifs.
    Juin 1941 : les troupes allemandes occupent la Roumanie qui s’allie à l’Allemagne.
    Témoin d’un pogrom de l’armée roumaine en juin 1941, puis d’un massacre de juifs commis par l’Einsatzkommando 10b de l’Einsatzgruppe D [2], Schellhorn arrive à convaincre le Sturmbannführer Alois Persterer d’arrêter ces meurtres à Czernowitz en juillet 1941, en invoquant des problèmes en matière de souveraineté avec Ion Antonescu qui veut "traiter" lui-même la question des Juifs de Roumanie.
    Curzio Malaparte, dans Kaputt, paru en 1943 (1946 en France), rapporte le pogrom de Iași en Roumanie, et une conversation avec Hans Frank, Generalgouverneur en Pologne, qui avec cynisme, commente ainsi : « Le peuple roumain n’est pas un peuple civilisé… tuer les Juifs, ce n’est pas dans le style allemand… Nous ne sommes pas un peuple d’assassins, nous. »
  • Le 4 octobre 1941, Ion Antonescu ordonne la déportation de tous les Juifs de Bessarabie et de la Bukovine en Transnistrie.
    Schellhorn apprend que tous les Juifs de Bucovine devaient être déportés. Les femmes et les enfants sont regroupés dans le ghetto à Czernovitz.
    Le consul général Schellhorn se rend à Czernowitz pour expliquer au gouverneur militaire de Bucovine, Corneliu Calotescu, que la déportation des Juifs de Czernowitz violerait les intérêts économiques et militaires de la Bucovine et de l’Allemagne, que de nombreux Juifs doivent travailler pour les entreprises allemandes qui approvisionnent la Wehrmacht. Il parvient à obtenir du Premier ministre roumain, le maréchal Ion Antonescu, qu’il connaissait personnellement depuis 1939, qu’il renonce à la déportation de 20 000 juifs, le 15 octobre 1941.
    Le sauvetage a été attribué au maire Traian Popovici, mais les documents montrent le rôle du diplomate.
  • La fin de la guerre
    Ion Antonescu a été arrêté le 23 août 1944 par le roi Mihai I. et ses conseillers. La trêve a été clôturée par un nouveau gouvernement démocratique. L’Armée rouge entre dans Bucarest, une convention d’armistice avec les Alliés, est signée le 12 septembre 1944. Antonescu est transféré en URSS, puis ramené en Roumanie pour être jugé. Le 17 mai 1946, Antonescu a été condamné à mort en tant que criminel de guerre par le tribunal populaire de Bucarest.

Le consul général Schellhorn est fait prisonnier par les Soviétiques, condamné à 25 ans de prison pour espionnage, il est prisonnier de 1944 à 1955.

Fritz Gebhard Schellhorn a toujours rejeté le culte de la violence, le mépris du droit et la "vision du monde" de l’infériorité des autres peuples.

Matatias CARP, Cartea neagra. Le livre noir de la destruction des Juifs de Roumanie, 1940-1944, traduit du roumain, annoté et présenté par Alexandra Laignel-Lavastine, Paris, Denoël, 2009 (1ère éd., Bucuresti, Societatea nationalâ de editurâ si arte grafice Dacia Traianǎ, 1948), 754 p.
Cartea neagra. Le livre noir de la destruction des Juifs de Roumanie
Mariana HAUSLEITNER, "Rescue operations for persecuted Jews with special reference to Bu-kowina 1941-1944", dans Wolfgang BENZ, Brigitte MIHOK "Holocaust on the periphery" "Judenpolitik und Judenmord in Rumänien und Transnistrien 1940 - 1944), Berlin 2009

Petit Cahier N°23 Guerre et génocide des Juifs à l’Est de l’Europe, Conférence-débat du Cercle d’étude du 18 mai 2012 : conférence de P.-P. Preux, témoignages de M. Kahn, de L. Cain, I. Choko, É. Gricman, poèmes d’A. Cytrin, textes de M. Braunschweig, M.-P. Hervieu, J.-L. Landier, C. Monjanel, N. Mullier, A. Pasques, B. Vinatier

Rose Ausländer, poétesse de la Bucovine, Nicht Oktober nicht November

NM

[1Rottenburg/Neckar dans l’arrondissement de Tübingen (Bade-Wurttemberg).

[2Einsatzgruppe, groupe mobile de tueries