Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah

Les déportés d’Avon. Au revoir les enfants.

Enquête autour du film de Louis Malle au temps des PAE
jeudi 1er octobre 2020

Le 15 janvier 1944, la Gestapo envahit le petit-Collège des carmes.
Trois adolescents juifs sont arrêtés : Hans-Helmut Michel, 13 ans, Maurice Schlosser, 15 ans, et Jacques Halpern, 17 ans.

  • Au revoir les enfants, film de Louis Malle, 1987, 103 min.

" « Le Père Jacques apparaît, suivi de deux Allemands. Il s’avance tranquillement, une valise à la main, son béret brun sur la tête et, avant de descendre les marches, s’arrête, regarde les enfants, souriant, radieux presque, et leur crie joyeusement :
“Au revoir, les enfants ! A bientôt !”
“Au revoir, mon Père, répondent d’un seul cri, élèves et professeurs et, spontanément, tous se mettent à applaudir frénétiquement.”
Le chef de la Gestapo se retourne alors furieux et crie :
“Taisez-vous, taisez-vous, silence !” »
PÈRE PHILIPPE, Le Père Jacques, Martyr de la Charité, 1947, p. 333.

Le 15 janvier 1944, le directeur du collège et trois enfants juifs cachés au collège des carmes à Avon, sont arrêtés. Au revoir les enfants, une fiction en grande partie autobiographique. Louis Malle se souvient du Collège d’Avon, de Jean, son nouveau voisin de dortoir qui semble cacher un secret...

Durant l’année scolaire 1942-1943, au cours du premier trimestre en 1943, le Père Jacques accueille, en sixième, cinquième et seconde, trois nouveaux élèves internes, sous les noms de Jean Bonnet, Maurice Sabatier et Jacques Dupré. Ils ont des faux papiers fournis par l’équipe de la mairie d’Avon avec qui le Père Jacques est en contact étroit en cette période d’Occupation : Rémy Dumoncel, le maire, directeur littéraire aux éditions Tallandier, le secrétaire de mairie, Paul Mathéry, et quelques autres.
Trois enfants juifs, Jacques Halpern (17ans) caché sous le nom de Jacques Dupré, Maurice Schlosser (15 ans) caché sous le nom de Maurice Sabatier, Hans Helmut Michel (13 ans) caché sous le nom de Jean Bonnet. Plusieurs membres de leurs familles ont été arrêtés lors de la rafle du Vél’ d’Hiv’ ou dans les mois qui ont suivi. Ils ont été confiés au Père Jacques par les soeurs de Notre-Dame de Sion qui, elles-mêmes, les avaient pris en charge dans des conditions mal connues.

Ils sont déportés le 3 février 1944 par le convoi n°67.

  • Les déportés d’Avon. Enquête autour du film de Louis Malle, "Au revoir les enfants"

En mars 1987, un professeur de français et un professeur d’histoire-géographie du collège d’Avon saisissent l’occasion de la sortie du film de Louis Malle, de l’intérêt des élèves pour le procès Barbie (1988-1989) et de son rôledans l’affaire des enfants juifs d’Izieu, pour lancer un P.A.E. (projet d’action éducative) intitulé « Enquête autour du film de Louis Malle " Au Revoir les Enfants" en 1987. Un groupe de volontaires de plus ou moins quarante élèves de tous niveaux, de la 6ème à la 3ème se lancent dans le projet.

Bernard Gidel, professeur de français, étudie Un sac de billes, Mon ami Frédéric, Le Journal d’Anne Frank, Le Silence de la mer, L’Ami retrouvé. Maryvonne Braunschweig, en histoire-éducation civique fait avec ses élèves, une étude de l’idéologie nazie et des crimes contre l’humanité. Dans d’autres disciplines, en anglais et en allemand, traduction de documents, en biologie, étude de la malnutrition, en dessin, inspiration dans les images du film et un vitrail de l’église d’Avon à la mémoire des déportés.
Visite des lieux, la rencontre de témoins de l’époque : le curé d’Avon et d’anciens élèves du Petit Collège des Carmes, qui étaient présents lors de l’arrestation des enfants juifs, discussion avec les grands-parents sur les problèmes de la vie quotidienne de l’époque, collecte de documents familiaux : vieilles affiches, journaux, photos, cartes d’alimentation, faux papiers d’identité, recherche des lois, des archives publiques collectées au C.D.J.C., dans les archives locales et dans les journaux locaux d’époque.
Des conférences-débats thématiques avec des élèves du collège et des adultes d’Avon, venue au collège de Lucie Aubrac.

Les enfants d’Avon

Une exposition et la publication d’une brochure sont prévues pour juin 1988. Ces activités seront préparées dans le cadre du club UNESCO animé par les deux professeurs qui ont lancé le projet, à raison d’une heure par semaine, entre 13h et 14h au collège. Les élèves, ont réalisé une centaine de panneaux.
La brochure s’est transformée en livre qui comprend le récit sobre et émouvant de l’histoire réelle de Hans Helmut Michel, jeune garçon juif allemand réfugié à Avon, du Père Jacques, directeur du collège, résistant et déporté, les personnages principaux du film. On raconte l’histoire de Lucien Weil, professeur juif de Fontainebleau, privé de son travail par les décrets de Vichy, du maire et des sept employés de mairie déportés d’Avon pour avoir procuré des faux papiers.
Les élèves qui ont participé à ce travail ont acquis un véritable esprit critique et une démarche historique. L’argent gagné par la vente des livres a permis le financement d’un voyage d’élèves à Auschwitz." Maryvonne Braunschweig

BRAUNSCHWEIG Maryvonne et GIDEL Bernard (dir.), Les déportés d’Avon. Enquête autour du film de Louis Malle, "Au revoir les enfants" , Paris, La Découverte, 1989 (1ère éd. Foyer des élèves du Collège d’Avon, 1988), 174 p.

Le père Jacques, 1900-1945, carme à Avon
Cf. L’Antisémitisme légal en France (1940-1944) – Résister, propager, Petit Cahier, 2e série, N°11, septembre 2010, p. 45-60.
Article rédigé avec l’aide du livre Les Déportés d’Avon et d’articles de Maryvonne Braunschweig parus dans les Petits Cahiers du Cercle.
NM