Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah

Addy Fuchs, déporté à 16 ans, camps de Blechhammer, Langenstein

dimanche 30 décembre 2018

Addy Fuchs vient de nous quitter. Grâce à son soutien et à celui de l’Amicale de Blechhammer-Auschwitz, des élèves du lycée Edgar Quinet ont pu faire un voyage à Auschwitz en 1998. Lors de nos journées "Résistance et Déportation", il nous a prêté de nombreux documents pour faire nos expositions.

Addy

Addy, par Michel et Hugo Fuchs

Addy Fuchs est né, en 1926 à Paris, de parents polonais qui se sont mariés à Ravamazowietska. Ils habitent à Belleville dans le XXe arrondissement, puis dans le Xe. Son père est tailleur à domicile. Ses parents sont naturalisés français en 1929. Addy a fréquenté l’école de la rue Martel, puis le lycée Colbert. Lycéen jusqu’au 26 juillet 1942, où il est arrêté à Vierzon en voulant franchir la ligne de démarcation avec de faux papiers. Il est transféré à Pithiviers, puis à Drancy, mais comme il est français, il est renvoyé à Pithiviers. Il est dans la baraque 14 surnommée « sport » avec un groupe de jeunes de 15 à 18 ans.

Addy Fuchs 1942

Déporté le 21 septembre 1942, par le convoi n°35, suite à un attentat au Rex, parmi les mille partants du convoi de représailles, Addy et ses copains songent à s’évader mais les autres occupants du wagon les en empêchent.

Carte jetée du train, Pithiviers
Photo Maryvonne Braunschweig, Pithiviers, juillet 2022

À l’arrêt du train à Cosel à quelques km d’Auschwitz, Addy pour être avec ses copains, se faufile parmi les deux cents hommes âgés de 16 à 40 ans sélectionnés pour le travail. Du camp d’Eichtal, il est transféré à Blechhammer, un ZAL für Juden [1], camp de travail pour juifs où un contremaître viennois le protège en lui confiant des tâches moins dures pour lui. Grâce à sa connaissance du yiddish, Addy apprend rapidement l’allemand.
Une petite bande de copains se constitue autour d’Addy, Henri Pudlowski qui appartenait à la Résistance, Serge, Raoul, Wily et Bernard, qui décident de partager leurs peines, leurs joies et les quelques morceaux de pain ou de pomme de terre supplémentaires. "Cette solidarité nous aidait à vivre".
Par un gars du STO, (service du travail obligatoire), Addy parvient à faire passer une lettre à ses parents où il tente de décrire la vie au camp.

extrait de lettre passée par un STO

Il est tatoué en 1944 seulement, lors de la prise du pouvoir du camp par le SS Schwarz, lorsque Blechhammer est rattaché au complexe d’Auschwitz III. En janvier 1945, les détenus sont évacués dans « les Marches de la mort » vers Gross-Rosen. De là il est dirigé vers le « Petit camp » de Buchenwald, puis envoyé au camp de Langenstein, camp extérieur de Buchenwald, pour travailler au creusement de tunnels pour abriter des usines de pièces de moteurs d’avions. Battu par les SS, il a la chance d’être aidé par ses copains et d’être sauvé par les Américains.
De retour chez lui, il retrouve ses parents cachés par la Résistance.

Après ma libération, le 21 avril 1945, je suis rentré à Paris, en mai, où j’ai retrouvé mes parents. J’allais à l’hôtel Lutetia pour attendre mes copains de camp et j’ai parlé, parlé, parlé … mais personne ne voulait m’écouter. On écoutait les résistants et pas du tout les enfants juifs déportés. Une femme m’a demandé si je connaissais son fils (même convoi, même parcours). Je l’avais vu mourir pendant la marche de la mort. Je n’ai pas pu le dire à sa mère, j’ai dit simplement que je l’avais perdu de vue lors de l’évacuation du camp. Elle m’a alors insulté, me disant que son fils était un bon garçon, et que moi je devais être un meurtrier, un Kapo, puisque j’étais revenu.

Malade, il ne peut, hélas, reprendre ses études. Il rejoint ses copains au parti communiste pour créer un monde meilleur et fréquente les associations de déportés, participe à la fondation de l’Amicale de Blechhammer en 1965. Il se marie, a 3 enfants et 3 petits enfants.

Samuel et Addy, DVD les enfants
en fond un exemple des panneaux réalisés par Addy au service des élèves

Addy a témoigné inlassablement auprès des jeunes, et même des très jeunes, pour une éducation à la tolérance. Il a pris une part active à la pose de plaques avec l’AMEDJ, Association pour la mémoire des enfants juifs déportés, dans les écoles primaires.
Il rêvait de construire un monde avec moins de haine.

De son convoi n°35, sur 1000 déportés, 29 étaient survivants en 1945.

Addy Fuchs, témoin, rescapé du camp de Blechhammer, vidéo pour les élèves

L’évacuation de Blechhammer

DVD (3) : 2 dvd, Enfants et adolescents dans le système concentrationnaire nazi
Samuel Pintel, un temps à la maison d’Izieu a échappé à la rafle du 6 avril 1944.
Le sauvetage des enfants juifs par l’OSE, pendant l’Occupation

Mémoire et histoire au lycée Edgar Quinet, Paris 9e

[1 Zwangsarbeitslager für Juden Z. A. L. für Juden  : camp de travail forcé pour juifs de l’Organisation Schmelt ( « Dienstelle des Sonderbeauftragten des RFSS und Chef der Deuschen Polizei fur Fremdvolkischen Arbeitseinsatz in OberSchlesen » L’organisation Schmelt service du représentant spécial du Reichsführer SS et du chef de la police allemande pour l’utilisation pour le travail de la main d’oeuvre étrangère), affiliée à la SS, a été créé, sur ordre d’Heinrich Himmler, le 15 octobre 1940, pour gérer le travail forcé en Haute-Silésie) qui a le droit de prélever de la main d’œuvre dans les trains de déportation en 1942, à Cosel (Haute-Silésie), jusqu’en 1943-1944.