Cercle d’étude de la Déportation et de la Shoah

Les fusillés du Fort du Vert Galant à Wambrechies

par Jacqueline Duhem
dimanche 8 avril 2018

Les autorités allemandes ont utilisé les forts autour de Lille, en plus de la citadelle de la ville, pour exécuter des otages et des résistants condamnés ou non par les tribunaux militaires.

Les fusillés du Fort du Vert Galant à Wambrechies, dans la métropole lilloise : un haut lieu de la répression allemande sous l’Occupation

De 1941 à 1944, les autorités allemandes ont utilisé les forts construits à la fin du XIXe siècle autour de Lille, en plus de la citadelle de la ville, pour exécuter des otages et des résistants condamnés ou non par les tribunaux militaires. Et la liste est longue : 68 au fort de Bondues, 69 au fort de Seclin, 88 au fort du Vert Galant à Wambrechies.

Les exécutions dans ce dernier fort ont lieu dès octobre 1941 mais concerne surtout l’année 1942. Quarante neuf hommes sont fusillés durant le seul mois d’avril 1942.
Ils avaient été désignés comme otages en raison de leur appartenance politique ou de leur participation à la grande grève des mineurs de mai-juin 1941, ou arrêtés pour leur implication notamment dans la première vague d’attentats et de sabotages qui marqua les semaines suivant cette grève et qui donna le signal de la lutte armée pour la libération de la France. La répression, menée par l’occupant nazi avec la complicité de la police de Vichy, s’est abattue en priorité sur les communistes. Les fusillés du Vert Galant étaient majoritairement des communistes, des ouvriers, mineurs, cheminots, métallos.

Mémorial et le fort du Vert Galant à Wambrechies
Photo J. Duhem

Le 31 mars 1942, cinq otages sont exécutés dans la cour ouest du fort. L’un d’entre eux était militant syndicaliste aux PTT et les quatre autres des militants communistes. Parmi eux, Elie Rabinovitch, né à Sklow en Russie en 1895, dans une famille juive. Ouvrier drapier à Lille, il avait été arrêté en tant que communiste. Julien Sarazin, né en 1913 à Pérenchies, était ouvrier du textile et habitait La Madeleine. Dès 1934, il était secrétaire des jeunesses communistes et, en 1937, s’engageait dans les Brigades internationales en Espagne où il fut grièvement blessé et amputé de la jambe gauche. Cela ne l’empêcha pas de former l’un des premiers groupes de FTP dans l’agglomération lilloise. Il fut arrêté, le 13 juillet 1941, par la police de Vichy alors qu’il distribuait des tracts invitant à la commémoration de la Fête nationale. Condamné à trois mois de prison par le tribunal de Lille, celle-ci à peine terminée, il fut livré aux forces d’occupation et devint otage.

Le 14 avril 1942, c’est trente cinq otages et résistants qui sont, à leur tour, fusillés au Vert Galant. Parmi eux, Joseph Hentgès, né à Wasquehal en 1875, demeurant à Hellemmes, ancien secrétaire général de la région du Nord du parti communiste français et ancien maire d’Hellemmes. Incarcéré à la citadelle de Huy en Belgique depuis septembre 1941 en tant qu’otage, il a été condamné à mort par le tribunal allemand de l’OFK 670, à la suite de la mort de sentinelles allemandes, lors de l’attaque d’ une cantine allemande par des résistants à Bruay-sur-Escaut.

Dans le groupe, on trouve aussi des mineurs du bassin houiller qui avaient participé à la grande grève de mai-juin 1941 comme Zdislas Ziartrowski, dirigeant des jeunes communistes de Harnes.

A la Libération, les corps des suppliciés ont été retrouvés inhumés dans une fosse commune, au terrain d’aviation de Marquette-Bondues, non loin du fort. Depuis 1985, des cérémonies ont lieu chaque année en mémoire des fusillés. En 2009, la municipalité de Wambechies a décidé de racheter le fort à l’armée pour en faire un lieu officiel de mémoire des heures sanglantes de l’Occupation. Depuis 2012, un Mémorial se dresse sur le lieu des exécutions, réalisé par Ilja Wedekind, un artiste allemand. Il représente quatre hommes suppliciés.

Mémorial du Vert Galant à Wambrechies
Photo J. Duhem

Les quatre visages expriment différentes émotions, allant de la passion à l’horreur, que l’artiste a voulu dépeindre.

Jacqueline Duhem

"Fusillés 1940-1944" : http://maitron-fusilles-40-44.univ-paris1.fr/